L’Uni et le CET se sont penchés sur les freins à la libre circulation des travailleurs européens au Luxembourg. (Photo: Shutterstock)

L’Uni et le CET se sont penchés sur les freins à la libre circulation des travailleurs européens au Luxembourg. (Photo: Shutterstock)

Difficultés dans la reconnaissance des diplômes, contraintes linguistiques dans le secteur public… Le Centre pour l’égalité de traitement et l’Uni relèvent, dans un rapport commun, cinq «restrictions et obstacles injustifiés au droit à la libre circulation et à la non-discrimination» des travailleurs européens au Luxembourg.

«La libre circulation des travailleurs est l’un des principes fondateurs de l’Union européenne (UE)», . «Elle comprend les droits de déplacement et de séjour des travailleurs, les droits d’entrée et de séjour des membres de leur famille et le droit d’exercer une activité professionnelle dans un autre État membre et d’être traité sur un pied d’égalité avec ses ressortissants. Des restrictions s’appliquent pour le service public.»

Pourtant, dans les faits, des «obstacles» viennent limiter ce droit, selon le Centre pour l’égalité de traitement (CET) et l’Université du Luxembourg (Uni). Dans un rapport conjoint, ils ont cherché à déterminer lesquels. Leur enquête se base sur une analyse de la législation et de la jurisprudence, les perceptions de 274 professionnels de structures publiques et privées, l’analyse de 230 offres d’emploi du secteur public (pour l’indicateur des exigences linguistiques), de 10 entretiens menés avec des citoyens de l’UE et des rapports de l’Ombudsman. Résultat: cinq points ont été identifiés comme étant les plus problématiques.

Retraits du droit de séjour

Le premier concerne le retrait du droit de séjour des citoyens de l’UE inactifs pour motif de «charge déraisonnable pour le système d’assistance sociale». Une disposition inscrite dans la loi luxembourgeoise et «conforme à la directive» européenne sur le sujet, admet le rapport. Qui regrette cependant l’absence de critères quantitatifs pour interpréter cette notion de «charge déraisonnable».

90,3% des personnes interrogées pour l’enquête estiment qu’une perte d’emploi due à une incapacité de travail ne devrait pas être une raison d’inciter la personne concernée à quitter le Luxembourg. 78% des citoyens européens au Grand-Duché et 52% des répondants Luxembourgeois ont la même opinion concernant une personne qui serait devenue incapable de travailler pour cause de maladie ou de handicap. 20% des Luxembourgeois estiment que les citoyens de l’UE devraient quitter le pays après avoir essayé tous les programmes de recherche d’emploi.

Regroupement familial

L’octroi du droit de séjour dans le cadre du regroupement familial fait également débat. 42% des citoyens européens plaident pour le «droit des enfants à rejoindre leurs parents au Luxembourg, indépendamment de leur âge et sans devoir justifier un quelconque état de dépendance financière à l’égard des parents.»

Le Luxembourg

Reconnaissance des diplômes

Le rapport souligne aussi le défi de la reconnaissance des diplômes, que ce soit pour étudier ou travailler dans le pays. «Le très faible nombre de décisions rendues par les juridictions administratives à ce sujet ne permet pas d’évaluer l’ampleur exacte des cas de refus de reconnaissance de diplômes». En revanche, la majorité des répondants à l’enquête prônent une telle reconnaissance dans l’ensemble de l’UE. Et que l’expérience professionnelle acquise dans un État membre devrait également être prise en compte.

Restrictions dans le secteur public

Le secteur public fait figure de mauvais élève en matière d’égalité dans l’accès au travail. Si le droit communautaire précise bien que des restrictions peuvent s’appliquer pour ce dernier, le CET et l’Uni les estiment trop importantes au Grand-Duché.

Ils jugent conforme de réserver des postes aux ressortissants nationaux dans «la magistrature, l’armée, la police, le corps diplomatique et certaines fonctions dirigeants dans les administrations et services de l’État». Moins pour les emplois de «l’administration gouvernementale et des administrations et services créés en son sein». Les exigences linguistiques ne leur semblent pas non plus toujours justifiées.

Leur analyse montre «qu’un Luxembourgeois a quatre fois plus de chances d’obtenir un emploi dans le secteur public qu’un citoyen de l’UE».

Prestations sociales

La dernière inégalité relève des prestations sociales pour les travailleurs transfrontaliers. «Je ne sais pas combien de retraite je vais avoir. En tant que Luxembourgeois, vous avez une meilleure idée de ce que vous recevez comme pension», souligne l’un des répondants. «Un frontalier belge ou français n’a pas accès au dossier handicap s’il ne travaille pas, à ce moment précis, au Luxembourg (en cas d’inaptitude ou de reclassement professionnel», illustre un autre.

Des inégalités surtout constatées par les citoyens européens

Le CET et l’Uni adressent notamment leur rapport aux acteurs politiques. Un sujet d’autant plus important pour le Luxembourg, qui compte 47% de travailleurs frontaliers et, parmi les 53% de résidents, 51,3% qui ne sont pas Luxembourgeois. Soit «un salarié sur quatre» ayant la nationalité luxembourgeoise, calcule le .

Notons que 72% des participants à l’enquête du CET et de l’Uni déclarent n’avoir jamais ou rarement observé d’inégalité de traitement à l’égard d’un citoyen européen dans le cadre professionnel ces cinq dernières années. Un chiffre qui descend à 58% pour les répondants n’ayant pas la nationalité luxembourgeoise.