Les agences immobilières ont créé 226 millions d’euros de valeur ajoutée en 2019. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Les agences immobilières ont créé 226 millions d’euros de valeur ajoutée en 2019. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Jean-Paul Scheuren demande un plan de maintien dans l’emploi pour les agences immobilières, qui subissent les conséquences de l’inflation. Elles sont 1.221 au Luxembourg et comptent 1.750 salariés. Explications.

, président de la Chambre immobilière du Grand-Duché (organisme qui représente les métiers d’agent immobilier, de syndic et de promoteur), dresse un lourd constat. D’après lui, 1.000 logements de moins ont été construits en 2022 et 1.500 autres manqueront en 2023, par rapport aux 4.000 construits par an environ ces dernières années. Conséquence: «Nous avons entre 40 et 50% de chiffre d’affaires en moins dans les agences». Il demande donc pour celles-ci un plan de maintien dans l’emploi (PME).

Mercredi 18 janvier, la Chambre immobilière a eu une première réunion avec le ministère de l’Économie à ce sujet. «Nous leur avons exposé notre demande: un plan qui concerne les salariés dans les métiers d’intermédiation commerciale. Elle doit maintenant passer en comité de conjoncture.» Plusieurs solutions sont envisagées pour les occuper pendant les périodes creuses, comme une «formation à l’Académie de l’immobilier».

Pourquoi uniquement les salariés? «Il n’y a pas de cadre légal permettant le chômage partiel pour les indépendants. Pendant le Covid, ils avaient bénéficié de mesures exceptionnelles. Mais nous gardons la situation à l’œil».

Un plan réservé aux agents immobiliers salariés

Le plan vise à «passer ce moment difficile en évitant que des gens soient licenciés», explique Jean-Paul Scheuren. Le nombre de personnes concernées varie selon les agences. «Cela dépend de comment leur activité a chuté. Certaines la maintiennent grâce à la location, d’autres non. Nous voulons lancer la démarche pour être prêts au moment où elles en auront besoin». En 40 ans, il n’a pas souvenir de la mise en place d’un tel plan dans le secteur, réputé pour sa compétitivité.

Malgré des records de ventes, «les réserves sont déjà atteintes» dans les agences,

Comme dans tous les secteurs, la situation s’explique par l’inflation. «La dans un court délai a fait reculer le nombre de prêts» et donc, la demande. En témoignent les prix dans l’immobilier qui, même s’ils continuent d’augmenter, le font moins rapidement depuis la fin d’année dernière.

Et les promoteurs? Ils ont la capacité de «résister plus longtemps», grâce au suivi des chantiers par exemple, illustre Jean-Paul Scheuren. «On constate déjà une activité réduite. Nous verrons dans les prochains mois s’il y a un besoin», ici aussi, d’un PME.

Cartographie du secteur

Selon les derniers chiffres du Statec, repris dans une réponse parlementaire, on comptait 1.221 agences au Luxembourg en 2019, pour 1.750 salariés. Le détail entre indépendants et grands groupes n’est pas connu. Sans surprise, 31,71% se trouvent dans le canton de Luxembourg et 25,54% dans celui d’Esch. Elles réalisent environ «7.800 transactions par an», précise Jean-Paul Scheuren.

Plus précisément, 6.837 appartements existants ou en construction et 3.547 maisons ont été vendus en 2021 au Luxembourg, d’après l’Observatoire de l’habitat. En plus de 2.395 terrains à bâtir.

1.058 entreprises et 1.250 employés étaient de leur côté spécialisés dans la promotion immobilière en 2019. Leur excédent brut d’exploitation (EBE, différence entre les produits et les charges d’exploitation) avait alors grimpé à 470 millions d’euros, contre 123 millions pour les agences. Et leur valeur ajoutée (richesse générée) à 575 millions d’euros, par rapport à 226 millions d’euros dans les agences.

La construction touchée

«12.000 personnes arrivent chaque année et ont besoin de se loger. Avec 1.500 logements en moins, il n’y en aura pas assez, et cela ne pourra pas se récupérer les années suivantes», s’inquiète , secrétaire général, tout en mettant en avant les difficultés rencontrées par les entreprises de la construction. .

«Une entreprise de construction “gagne” en moyenne 2% de son chiffre d’affaires brut. Il n’est donc définitivement pas possible d’absorber les hausses de coûts à venir». De quoi expliquer la frilosité de certains investisseurs.

La FDA préconise une «abolition des frais d’enregistrement sur la quote-part construction déjà réalisée» pour encourager les promoteurs à poursuivre les projets malgré leurs craintes. Elle plaide aussi pour que les acteurs publics puissent prendre le relai des investisseurs privés, ce qui permettrait d’en faire aboutir certains «qui ont passé le stade de la planification de l’État, et les communes pourraient avancer leurs travaux de rénovation».

Moins de problèmes chez les notaires

Interrogé sur des solutions à long terme pour les agences, Jean-Paul Scheuren espère plutôt que «la conjoncture s’améliore. On ne s’attend pas à ce que la situation perdure». Même s’il imagine que celle-ci persistera encore durant les six prochains mois, durée pour laquelle il souhaite obtenir son PME.

Du côté de la Chambre des notaires du Grand-Duché de Luxembourg, qui compte sept membres au sein de son conseil, sa présidente explique que «contrairement au champ d’action restreint des agents immobiliers, celui des notaires est plus vaste. Nous n’allons donc pas faire de demande de chômage partiel. Certes, le nombre d’actes de vente a fortement diminué, mais nous en faisons encore dans d’autres domaines. Il est vrai qu’il a baissé pour certaines études qui étaient plus axées sur le civil, comme des Vefa (vente en état futur d’achèvement). Les ventes d’immeubles existants se font toujours, de manière plus ralentie», termine-t-elle.