Mercredi 11 janvier, le CEO de Cenaro Group, Christophe Chevallier, a annoncé à ses employés qu’il allait mettre le groupe en faillite. (Photo: Guy Wolff/Maison Moderne/Archives)

Mercredi 11 janvier, le CEO de Cenaro Group, Christophe Chevallier, a annoncé à ses employés qu’il allait mettre le groupe en faillite. (Photo: Guy Wolff/Maison Moderne/Archives)

Le CEO du groupe immobilier Cenaro, Christophe Chevallier, a annoncé à ses employés qu’il allait déclarer le groupe en faillite. Une centaine de familles devraient faire jouer leur garantie financière d’achèvement pour espérer au moins ne pas perdre trop de plumes dans l’aventure.

«Nous sommes arrivés à une situation financière qui ne nous permet plus d’honorer nos engagements, ainsi que vos salaires. Bien que je sois toujours en recherche de solutions, certaines même imminentes, celles-ci tardent malheureusement à se formaliser malgré tous nos efforts (…) C’est pourquoi je tenais à vous informer que j’ai décidé de procéder à l’aveu de faillite de Cenaro Group et Cenaro Technical Services.»

Cet aveu doit intervenir cette semaine, a indiqué le CEO de Cenaro Group, Christophe Chevallier, dans le mail qu’il a adressé à ses employés mercredi dernier, les invitant à laisser leurs coordonnées et à restituer matériel informatique, smartphones, voitures de leasing et carte de carburant.

Les difficultés financières du groupe, révélées par Reporter, début décembre, semblent avoir pris une tournure plus grave encore, comme en témoigne la première faillite d’une des 88 structures du groupe. En effet, à la veille de Noël, Chevallier Constructions, avec laquelle l’entrepreneur avait racheté Villa Constructions, a mis la clé sous la porte.

Cenaro Capital au cœur de la tourmente

Le Français, qui a déjà supprimé toute référence au Luxembourg sur son profil Linkedin, est arrivé au Luxembourg en 2015 avec quelques belles lignes sur son CV, de la gestion de grande fortune chez Deutsche Bank au développement d’un programme immobilier pour senior chez Nexity en passant par le développement d’outils de financement pour des activités de promotion immobilière chez Oceanis.

C’est à partir de son expérience qu’il décide de se lancer dans la promotion immobilière, avouant dans une interview vouloir mettre sur pied un groupe intégré, de l’agence immobilière au design des appartements ou maisons qu’il vendrait. Un groupe dans lequel deux structures, Cenaro Capital et Ceninvest, seraient même en concurrence pour apporter au groupe les liquidités dont il a besoin pour acquérir les terrains et financer les constructions jusqu’à la livraison à des clients.

C’est là que la machine semble s’être grippée ces derniers mois. Quand un promoteur veut éviter de passer par le crédit ou par ses actionnaires, il peut émettre un produit financier que pourront souscrire des investisseurs professionnels. Comme ces investisseurs ont généralement une meilleure crédibilité que le promoteur, ce dernier obtient par ce biais une ligne de trésorerie à moindre coût.

Des investisseurs en colère

Mais lorsque les taux d’intérêt augmentent autant que les perspectives négatives pour l’économie, les investisseurs peuvent être soit plus attentifs aux risques qu’ils prennent voire essaient de récupérer leur mise; soit être désireux d’aller s’aventurer vers des produits plus rentables, indexés sur les nouveaux taux d’intérêt.

Et si un promoteur a davantage de besoins de financement, pour multiplier les chantiers, par exemple, même lorsqu’ils sont potentiellement très rentables, il peut être plus difficile de trouver de nouveaux financements, voire de payer les coupons des investisseurs qui sont déjà dans l’aventure.

Selon nos informations, certains de ces investisseurs dans les produits financiers de Cenaro Group – donc de Cenaro Capital l’organisme de titrisation non régulé qui fournit les liquidités au groupe – et d’autres personnes ont introduit des plaintes auprès de la justice luxembourgeoise. 

Conséquence: sans nouvelles liquidités, pas moyen de payer le salaire des employés ni les sous-traitants. Pas de paiement des sous-traitants, pas de travaux. Et pas de travaux, pas de déblocage des montants dont doivent s’acquitter les clients finaux. Un cercle vicieux qui laisse dans l’incertitude une centaine de familles qui seraient en attente de récupérer leur appartement ou leur maison.

«Pas de panique. Il faut les rassurer», insiste le CEO d’Eurocaution, Alessandro Rizzo, ce mardi 17 janvier. Sa société, qui couvre 90% du marché luxembourgeois, est concernée par une partie significative des chantiers qui ne sont pas terminés (ou pas commencé du tout), a appris Paperjam. Interrogé dans la foulée, il le reconnaît et appelle les clients, une fois que la faillite aura été publiée au registre du commerce, à faire jouer la garantie d’achèvement des travaux. Sur son site internet sera mis en place un formulaire avec une foire aux questions, que les clients devront remplir avec beaucoup d’attention pour garantir un traitement plus efficace des dossiers. À charge pour lui de faire terminer les travaux ou de rembourser les tranches de paiement que les clients ont payés pour leur quote-part construction.