Pour attirer les jeunes talents dont elle a besoin, la Luxembourg Startups Association préconise des mesures fiscales et des aides spécifiques pour un laps de temps précis. (Photo: Shutterstock)

Pour attirer les jeunes talents dont elle a besoin, la Luxembourg Startups Association préconise des mesures fiscales et des aides spécifiques pour un laps de temps précis. (Photo: Shutterstock)

Dans le quatrième des cinq volets de son Manifesto, qu’elle adresse aux candidats aux élections à venir, la Luxembourg Startups Association invite à prendre des mesures (fiscales, entre autres) spécifiques pour attirer les célibataires dans l’écosystème de l’innovation.

Le fait est assez méconnu. Quelle est la principale différence entre la Suisse et le Luxembourg, quand il s’agit d’aborder la question de l’attractivité? Le coin fiscal qui permet d’évaluer la part des revenus du travail qui est captée par l’impôt. Plus ce taux est bas, plus le salarié empoche une part importante du salaire qu’il a négocié avec son employeur.

En Suisse, il est stable entre 22% et 23% depuis 2000 (contre 35% pour la moyenne de l’OCDE). Au Luxembourg, où il a atteint son plancher (31,59%) en 2002, il n’a quasiment plus cessé de monter, pour dépasser la moyenne de l’OCDE en 2009 et atteindre son plus haut niveau… en 2021 à 40,2%, 2021 étant la dernière année de statistiques. Autrement dit, la part qui reste dans la proche d’un salarié n’a jamais été aussi basse. Cette statistique, évidemment, n’honore pas la «Start-Up Nation», comme le souligne plus diplomatiquement la Luxembourg Startups Association dans le quatrième des cinq chapitres de son Manifesto, à l’intention des candidats en campagne pour les élections communales et législatives.

Comme les loyers et le coût de la vie n’ont cessé d’augmenter, les entrepreneurs qui voudraient recruter une, deux ou trois personnes dans le cadre du démarrage d’une jeune entreprise innovante, n’ont plus d’atouts dans leur manche pour les attirer au pays, sans même avoir seulement abordé la question des transports.

Un régime d’exception pour trois à cinq ans

La LSA recommande donc que les célibataires qui décident de s’installer à Luxembourg dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée bénéficient d’un avantage fiscal direct, d’une aide au logement et d’autres aides indirectes – non définies dans le document – pour une durée de trois à cinq ans, ainsi qu’une procédure d’octroi accélérée de permis de travail pour les candidats qui ne sont pas issus d’un État membre de l’Union européenne.

En fait, pour mesurer l’attractivité du Luxembourg en matière de start-up, la problématique est un tout petit plus large. Elle devrait comprendre deux autres indicateurs: l’intérêt des projets qui sont développés au Luxembourg et la vie sociale de l’écosystème – aujourd’hui surtout rythmé par le Fintech Friday de la Lhoft et quelques événements ponctuels.

Mais restons sur l’axe fiscalité-logement de la LSA. Existe-t-il un moyen de mesurer l’attractivité du Luxembourg par rapport à quelques spots de la tech en Europe?

Essai de modélisation des différences

Prenons six pays européens. Embauchons un employé au salaire moyen, célibataire sans enfant, et logeons-le dans un appartement à une chambre qu’il loue. Ce qui lui restera à la fin de chaque mois, taxes, impôts, loyers, charges, impondérables du budget d’un ménage constituera ce bling-bling d’attractivité. Nous avons pris volontairement les pays frontaliers plus le Portugal, devenu un hot spot des développeurs en manque de soleil et de l’Estonie toujours très en forme pour vanter son modèle. Nous aurions pu prendre la Suisse, qui figure dans tous les rapports sur les recrutements de développeurs.

Que dit ce tableau? Qu’une fois que l’employé a tout payé, il lui reste 210 euros par mois en Allemagne, 205 en France et 172 en Estonie. Le Luxembourg n’est que quatrième avec 104 euros.

Mais disons-le tout de suite: ces chiffres pourraient assez facilement prêter le flanc à la critique. Les employés de la tech touchent-ils des rémunérations proches du salaire moyen? Il existe assez peu de littérature au-dessus de tout soupçon, parce que différents aspects entrent en ligne de compte, de la part de la technologie dans le PIB national à la concurrence des talents, en passant par l’âge et l’expérience de l’employé.

Des données critiquables

Codesubmit, par exemple, qui renseigne sur le niveau de rémunération partout sur la planète pour tous les profils de la tech fixe à 49.138 euros, en Allemagne, le salaire d’un développeur junior – comme ceux qu’on aimerait attirer au Luxembourg – alors que le salaire moyen n’est qu’à 44.312 euros, selon l’OCDE. La différence de 4.826 euros par an au profit de l’employé rend l’Allemagne encore plus sexy, à l’inverse de la France ou, surtout du Portugal, où les mêmes données semblent montrer que les jeunes développeurs touchent moins que le salaire moyen et donc ont potentiellement plus de difficultés à s’en sortir.

Autre aspect, sur le site de Numbeo, que nous avons utilisé pour avoir un indicateur similaire dans nos six pays, il y a une vraie différence entre le prix moyen d’un logement au niveau national et à celui d’une ville. Habiter à Berlin, Paris ou Lisbonne coûte beaucoup plus cher qu’habiter en Allemagne, en France ou au Portugal. Or, tous les écosystèmes de start-up ont besoin de concentration, de bouillonnements et de ne pas être trop loin les uns des autres.

Enfin, le résumé des dépenses mensuelles de Numbeo que nous avons retenu cache d’énormes variations selon le mode de vie et on peut avoir des résultats très différents en modifiant quelques aspects.

N’empêche, cela montre que le Luxembourg ne peut pas prétendre offrir une meilleure situation à de potentielles recrues.

Manifesto (1/5):

Manifesto (2/5):

Manifesto (3/5):

Manifesto (5/5):