Quelle évolution majeure observez-vous dans le domaine du fleet management?
Christophe Colacino. – «C’est un domaine en pleine mutation. Avant, un salarié allait voir son gestionnaire de flotte pour un conseil après avoir récolté deux ou trois offres pour un véhicule. Il y avait globalement peu de questions; tout le monde voulait un diesel. Et l’interaction s’arrêtait souvent là. Désormais, cela va bien plus loin. Lorsque le véhicule hybride est venu timidement titiller le marché vers 2016, les questions sont devenues plus nombreuses. Mais ce n’était rien comparé à aujourd’hui, si le salarié envisage d’opter pour l’électrique.
C’est donc l’électrification, et plus généralement la source d’énergie du véhicule, qui chamboule votre métier?
«Cela a considérablement complexifié les choses, notamment dans le sillage de l’objectif gouvernemental d’atteindre un parc automobile électrique à 49% d’ici 2030. Mais ce n’est pas la seule raison.
Quels sont les autres facteurs auxquels fait face votre métier?
«Tout d’abord, le fait que le concept de mobilité a changé. Pour la jeune génération, la voiture n’est plus forcément une priorité. Avant, celle-ci était un symbole de liberté. On faisait le plein et on pouvait faire le tour du monde! Aujourd’hui, la jeunesse veut autre chose. Les leasers l’ont flairé et tentent de s’adapter, en réfléchissant à offrir d’autres options. Mais l’État, lui, a plus de mal. Il est en retard en ce qui concerne l’encadrement en entreprise de cette nouvelle forme de mobilité.
Les Belges ont un concept fabuleux: le budget de mobilité. Il permet d’allouer son budget leasing à d’autres projets de mobilité.
Nos voisins font-ils mieux?
«Au Luxembourg, votre budget de leasing, s’il n’est pas investi dans une voiture, ne peut l’être que pour un vélo ou une trottinette. Les Belges, eux, ont un concept fabuleux: le budget de mobilité. Il permet d’allouer son budget leasing à d’autres projets de mobilité. On peut se faire rembourser des billets de train, de bus ou même… d’avion! Ses frais personnels d’essence aussi. Mais cela va encore plus loin. Si vous vous engagez à déménager dans un rayon de 10 km autour de votre lieu de travail, vous pouvez même vous en servir pour rembourser votre emprunt immobilier ou payer votre loyer.
La fiscalité liée au leasing a également pas mal évolué ces dernières années…
«C’est le troisième pilier que j’identifie comme ayant influencé le métier de fleet manager. Au Luxembourg, il existe une pression fiscale mise par le gouvernement. Tout d’abord, avec la réforme sur l’avantage en nature, qui a déjà changé et va encore évoluer. C’est clairement un frein au choix d’un véhicule thermique. Tout comme les primes accordées par le gouvernement. Celles-ci sont telles qu’il arrive qu’un salarié paie désormais la même mensualité pour un modèle électrique d’une valeur de 65.000 euros que pour un modèle thermique à 45.000 euros. Et puis, il y a la nouvelle législation sur la TVA qui arrivera prochainement. Elle est liée à l’arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne et impactera les budgets de leasing.
Les petites entreprises rencontrent-elles des difficultés face à tant de complexité?
«Oui. Avant, il arrivait que la flotte soit gérée par un(e) assistant(e) RH ou même un(e) secrétaire de direction avec un bon tableur. Aujourd’hui, ce n’est clairement plus possible. Il faut passer par des professionnels. D’ailleurs, si pendant longtemps, nous nous sommes sentis assez seuls sur ce marché, ce n’est plus le cas aujourd’hui. C’est un secteur qui est devenu tendance. Même certaines grandes structures ont décidé d’y investir. Apparemment, elles y voient une source de diversification intéressante.»
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Cette interview a été rédigée pour l’édition magazine de parue le 24 mai 2023. Il fait partie du dossier Enjeux consacré à la voiture de société. Le contenu du magazine est produit en exclusivité pour le magazine. Il est publié sur le site pour contribuer aux archives complètes de Paperjam.
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