Au Luxembourg, la pierre a toujours été considérée comme un bon placement. La plupart des résidents cherchent à acheter pour eux-mêmes. Devenir propriétaire est en effet envisagé comme un moyen d’épargner pour ses vieux jours. Ceux qui peuvent se le permettre, considérant le prix d’acquisition d’un bien au Grand-Duché, investissent aussi volontiers pour louer. « Beaucoup de familles fortunées investissent dans l’immobilier dans une optique de diversification de leur patrimoine, commente Mike Schwörer, Head of Housing Advisory au sein de la BIL. Ces dernières années, avec la forte hausse de la valorisation de l’immobilier au Luxembourg, on a vu cette population d’investisseurs s’élargir. De plus en plus de résidents, disposant d’un revenu confortable, ont développé un réel attrait pour l’investissement immobilier en vue de louer. »
Un placement attractif
C’est la conjoncture, ces dernières années, avec des taux d’emprunt attractifs, des incitants fiscaux au rendez-vous et la perspective de pouvoir bénéficier de la hausse spectaculaire des prix de l’immobilier résidentiel au Luxembourg, qui suscitent un tel appétit. « Le principal attrait reste l’évolution des prix du marché. Quand la valeur d’un bien connaît une croissance annuelle à deux chiffres, comme ce fut le cas ces dernières années, beaucoup souhaitent pouvoir en bénéficier, explique Tehdi Babigeon, Partner, COO & Head of Business Development and Capital Markets au sein d’INOWAI. Dans cette perspective, le gain en capital apparait bien supérieur au rendement locatif brut. »
De plus en plus de résidents, disposant d’un revenu confortable, ont développé un réel attrait pour l’investissement immobilier en vue de louer.
À chacun ses objectifs
Au-delà de ce désir de profiter de la hausse des prix du marché, l’investissement locatif peut poursuivre de nombreux objectifs. « Il est important de les identifier et de les comprendre avant de procéder à un investissement. Certains vont chercher un revenu supplémentaire, d’autres vont tenter de réduire leur charge fiscale ou encore d’investir maintenant afin de maintenir leur niveau de vie une fois arrivés à la pension », commente Mike Schwörer. L’objectif va conditionner la nature et la durée de l’investissement. « Si l’approche est purement fiscale, par exemple, on se tournera vers du neuf (VEFA) afin de profiter des possibilités d’amortissement accéléré, dans l’optique de vendre au-delà de cinq ans », poursuit le banquier.
Une dynamique de marché ralentie
L’attrait pour l’investissement locatif reste grand. Et, de l’avis de nos deux experts, cela reste un placement sûr. Toutefois, rien ne garantit que la dynamique de marché qui prévaut depuis deux ou trois années va se maintenir à ce niveau. D’autre part, il faut aussi pouvoir accéder à ces biens immobiliers avec un prix au m2 qui a atteint des sommets. « Le durcissement des conditions d’octroi d’un crédit au 1er janvier 2021 – la CSSF exigeant désormais un apport personnel correspondant à 20% de la valeur du bien – pour de tels investissements a freiné la demande, poursuit Mike Schwörer. Jusqu’il y a peu, la banque pouvait encore financer 90% de la valeur du bien, et même parfois plus. »
Le simulateur de prix du site logement.lu, par exemple, estime le prix d’un appartement standard de 70 m2 à Luxembourg-Ville, avec 1 terrasse et 1 parking, à 893.000 euros. L’acquérir implique de pouvoir apporter 178.600 euros. « Au niveau du neuf, le marché tourne d’ailleurs au ralenti depuis le début de l’année en raison d’éléments conjoncturels : le contexte inflationniste lié à la situation économique mondiale, l’impact sur le prix des matières premières et de l’énergie et in fine sur les coûts de la construction, explique Tehdi Babigeon. Beaucoup d’incertitudes entrent en ligne de compte, et le conflit Ukrainien est encore venu renforcer ce sentiment. » La prévisibilité, essentielle lorsque l’on investit, n’est pas garantie.
S’il ne faut pas surévaluer les loyers, la conjoncture actuelle, avec des difficultés croissantes à accéder à la propriété devrait être favorable à la location.
Augmentation des coûts et des taux
Il faut donc faire preuve de prudence, lorsque l’on aborde ce type d’investissement. L’évolution des prix, sur deux ans, peut avoir des répercussions importantes sur le montant d’acquisition et, dès lors, affecter considérablement le rendement brut espéré. « Au niveau de l’octroi de financement, nous prenons en considération l’ensemble de ces critères, assure Mike Schwörer. Il est essentiel de s’assurer que l’emprunteur, au regard de l’augmentation du coût de la vie, sera en mesure de rembourser son emprunt et gardera assez pour subvenir à ses besoins. »
L’augmentation attendue des taux d’intérêt, par ailleurs, invite à une réflexion approfondie sur la nature de l’emprunt, entre un variable ou un fixe, en fonction des objectifs poursuivis. « Si l’on emprunte à long terme, afin de s’assurer un revenu au-delà de la fin de carrière, on privilégiera un taux fixe, plus élevé, mais assurant une plus grande prévisibilité. S’il s’agit d’un investissement fiscal, avec une perspective de revente à un horizon de 6 à 7 ans, le variable sera souvent plus intéressant », explique le banquier.
Considérer les frais annexes
Enfin, l’investissement locatif, s’il est attractif, n’est pas non plus sans risque et exige de prendre en considération un ensemble de variables. « D’abord, il y a des frais liés à l’acquisition ainsi que d’autres liés à l’entretien et à la maintenance du bien, ou encore des frais d’assurance, commente Tehdi Babigeon. Entre le neuf, couvert par une garantie décennale, et l’ancien, ces coûts peuvent varier. Il y a aussi des charges liées à la copropriété. Enfin, le propriétaire s’expose aussi à des périodes de vide locatif, qui auront un impact direct sur son rendement brut et peuvent entrainer des difficultés liées au remboursement de l’emprunt. Il faut bien estimer l’ensemble des éléments. »
Tout ceci bien considéré, il faut savoir que le marché de la location est considéré comme porteur. « S’il ne faut pas surévaluer les loyers, la conjoncture actuelle, avec des difficultés croissantes à accéder à la propriété devrait être favorable à la location », assure Tehdi Babigeon.
Ne pas se précipiter
Le principal piège, lorsque l’on envisage un projet d’investissement locatif, c’est la précipitation. « L’enjeu est de pouvoir bien définir son projet, les contours de celui-ci, dans un marché qui appelle le plus souvent à prendre des décisions rapides, poursuit l’associé d’INOWAI. Un investisseur, en l’occurrence, ne doit jamais oublier que le principal enjeu le concernant, c’est la rentabilité. Pour qu’elle soit optimale, il faut que le sous-jacent soit pertinent, bien localisé, facilement accessible en transport en commun, proche des services comme des écoles ou des crèches. Il est important que les fondamentaux soient bons. »
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