Sur 37.500m2 répartis en deux bâtiments, le Belval Plaza comptera 89 boutiques à la fin de l’année. (Photo: Maison Moderne)

Sur 37.500m2 répartis en deux bâtiments, le Belval Plaza comptera 89 boutiques à la fin de l’année. (Photo: Maison Moderne)

D’ici la fin de l’année, le Belval Plaza, repris en 2020 par Firce Capital, aura presque atteint le maximum de ses capacités, avec un taux d’occupation de 95%. D’ici là, l’arrivée de nouvelles enseignes est annoncée, dont le premier KFC du pays et un nouvel espace de 2.800m2 qui accueillera un food hall et un magasin de sport. 

Firce Capital est propriétaire du centre commercial depuis 2020, quelques semaines à peine avant le Covid. Quelle stratégie avez-vous mise en place depuis pour le développer?

Thierry Debourse (T. D.). – «Nous avons une équipe pluridisciplinaire, avec des salariés venant de différents horizons. À la suite du rachat du Belval Plaza, le Covid nous a permis de nous demander quels étaient les impacts des différentes crises sur le retail, qui est un secteur très résilient. Notre objectif est d’adapter le centre aux nouveaux besoins. Nous adaptons aussi la gestion de notre relation contractuelle avec nos commerçants, pour garder cette capacité de pouvoir adapter les baux aux fluctuations du marché, de rediviser des surfaces ou d’en augmenter d’autres si c’est nécessaire et selon les besoins de nos commerçants. D’une façon plus générale, il faut être attentif à ce qui se fait ailleurs, dans les grands centres en Europe et dans le monde, comme par exemple au Moyen-Orient avec des centres commerciaux plus récents, ou sur des marchés très résilients et créatifs, tels que la Turquie. Cela nous permet de voir quels concepts pourraient être importés ici. C’est notre marque de fabrique, ce que nous proposons est démontré par les réalités du marché.

Comment vous efforcez-vous de suivre les tendances en matière de consommation? 

T.D. – «Nous avons justement profité de la période du Covid pour prendre un temps de réflexion et analyser les tendances actuelles, futures, et surtout les demandes en interrogeant nos commerçants et nos clients. Nous avons remarqué que les gens allaient de plus en plus se tourner vers le bien-être et les soins. C’est ainsi que la parapharmacie Medi-Market nous a rejoints en 2022, ainsi qu’un centre de soins Inspire. Autre exemple, les segments de marché qui ont la cote sont le discount, le haut de gamme, ainsi que le luxe. Dans le bâtiment 2, nous avons donc pu accueillir des enseignes telles qu’Action ou Trafic, qui attirent beaucoup de monde. C’est éhalement le cas pour d’autres enseignes telles que Tiffosi ou encore Slumberland, qui est une vraie référence pour les amateurs de BD et de manga.

Le managing director Private equity de Firce Capital, Pierre-Olivier Defoug (à gauche), et le directeur du Belval Plaza et shopping center manager de FC Property Management, Thierry Debourse.  (Photo: Maison Moderne)

Le managing director Private equity de Firce Capital, Pierre-Olivier Defoug (à gauche), et le directeur du Belval Plaza et shopping center manager de FC Property Management, Thierry Debourse.  (Photo: Maison Moderne)

Quelles nouvelles enseignes s’installeront cette année?

T. D. – «Nous aurons le premier KFC du Grand-Duché en octobre. Il ouvrira dans le Belval Plaza 2, avec plus de 70 emplois. Dans le bâtiment 1, l’enseigne Sports Direct , dans un nouvel espace de 1.200m2 créé à l’étage, près de l’entrée de la gare. C’est un peu le ‘Decathlon anglais’, plus qualitatif en termes de vêtements. Il proposera, entre autres, des corners des marques Nike et Adidas. Toujours dans le Belval Plaza 1, Kiko ouvrira début juin, ainsi que Yogurtlandia, une enseigne italienne de frozen yogurt qui ouvrira en juillet. En septembre,  Luxboba qui propose des bubble teas et équivalents, ouvrira également ses portes.

Le bâtiment 2 Moien Vietnam, un restaurant asiatique, ouvrira en septembre, et, juste à côté, l’auto-école Rookie. Voilà encore un service important, où après y être allés, nous sommes certains que les gens resteront et deviendront clients pour ceux qui ne nous connaissent pas encore.  

Le KFC ouvrira dans le bâtiment 2, au rez-de-chaussée, avec une cinquantaine d’emplois à la clé. (Photo: Maison Moderne)

Le KFC ouvrira dans le bâtiment 2, au rez-de-chaussée, avec une cinquantaine d’emplois à la clé. (Photo: Maison Moderne)

Enfin, dans le bâtiment 1, il y aura bientôt le food hall, qui ouvrira fin d’année 2024, avec quatre restaurants et un bar, du côté de l’entrée de la gare, et un espace ‘grab’n’go’. Trois escalators ont été installés pour fluidifier l’accès à ce food hall.

Starbucks était aussi évoqué…

T. D. – «Oui, nous sommes en discussion avec Starbucks. Il y a deux possibilités: soit ouvrir un vrai Starbucks café, dans une perspective un peu plus lointaine, soit installer des machines de qualité dernier cri, comme on en trouve sur les autoroutes ou les aéroports, et dans ce cas-là, elles seraient situées dans l’espace grab’n’go.

 On trouve déjà une belle offre de proximité tout autour, pourquoi voulez-vous créer ce food hall? On sait que dans certains autres centres du pays, le succès des food courts est parfois à relativiser. 

T. D. – «On ne crée pas un food hall sans avoir la certitude d’avoir un flux important et une demande. Il occupera une place stratégique, car un quart de notre flux vient de la gare. Nous avons également analysé les besoins en termes de restauration. Aujourd’hui, nous avons beaucoup de restaurants présents, mais dans un ‘monothème’. Autrement dit, on trouve essentiellement des burgers. Il manque un type de fast-food complémentaire à KFC. Par exemple, il n’y a pas de Pizza Hut, de Sushi Shop ou de Nata Lisboa, qui sont des enseignes de semi-fast-food très qualitatives. Le food hall accueillera quatre restaurants et un grand bar Corona, bar iconique dont l’enseigne sera visible depuis le rez-de-chaussée, comme un repère visuel. Nous imaginons ce food hall comme le lieu de rendez-vous du centre, visible depuis la galerie. Nous n’y intégrons pas le KFC, qui sera dans le BP 2. En revanche, notre analyse du flux nous fait ajouter un espace grab’n’go qualitatif, avec des frigos intelligents. Il sera aussi possible de réchauffer les produits sur place avant de partir.

Des travaux de gros œuvre ont été nécessaires afin de créer un nouvel espace de 2.800m2 qui accueillera le futur food hall et le magasin Sports Direct. (Photo: Maison Moderne)

Des travaux de gros œuvre ont été nécessaires afin de créer un nouvel espace de 2.800m2 qui accueillera le futur food hall et le magasin Sports Direct. (Photo: Maison Moderne)

Pierre-Olivier Defoug. (P.-O. D.)– «La Rockhal et le Kinepolis sont aussi demandeurs d’une offre de restauration plus proche.

Quels seront les restaurants du food hall? Les enseignes alimentaires déjà existantes, comme Fischer par exemple, l’intégreront-elles?

T. D. – «Il est encore trop tôt pour en parler, mais nous les dévoilerons bientôt. Les autres restaurateurs resteront à leurs emplacements. 

Avec toutes ces ouvertures, quel taux d’occupation atteindrez-vous? Que dire de la fréquentation?

T. D. – «En fin d’année, nous compterons 89 boutiques dans le ‘nouveau’ Belval Plaza, avec un taux d’occupation de 95%. Par ailleurs, un turn-over annuel raisonnable nous permet d’être en adéquation, avec le marché en nous permettant d’accueillir de nouvelles enseignes. C’est aussi ça notre rôle: penser aux perspectives pour rendre pérenne l’équipement.

P.-O. D. – «Selon moi, la donnée chiffrée la plus marquante, c’est le flux: 7 millions de visiteurs chaque année, soit la plus grosse fréquentation du pays. Nous voyons aussi que les flux augmentent, comme celui en provenance de la gare qui augmente de 12% par an. Et la base du commerce, c’est d’avoir des visiteurs, c’est un cercle vertueux que nous avons voulu créer en faisant l’acquisition du centre. Nous sommes sur une zone en plein développement, notre objectif est de trouver et d’affiner notre stratégie. En termes de fréquentation toujours, nous notons aussi un très bon temps de visite: 1h18. Nous travaillons en permanence pour maintenir, voire augmenter, ce temps de visite. La gestion d’un centre commercial, c’est de la fine couture!

D’ici la fin de l’année, le taux d’occupation du Belval Plaza aura atteint les 95%. (Photo: Maëlle Hamma/Maison Moderne)

D’ici la fin de l’année, le taux d’occupation du Belval Plaza aura atteint les 95%. (Photo: Maëlle Hamma/Maison Moderne)

Quels revenus génère le centre? 

T. D. – «Ce sont des chiffres confidentiels.

P.-O. D. – «Ce que nous pouvons dire, c’est que le centre de Belval Plaza se positionne, en termes de loyers, à des niveaux sensiblement inférieurs à ceux d’autres centres commerciaux du pays. Mais le Belval Plaza est un centre en plein développement, ce qui implique, à terme, une augmentation progressive des loyers. Le retour d’expérience montre que tous les nouveaux locataires ont toujours surperformé en matière de chiffres d’affaires. 

Comment se passent les relations avec les commerçants?

T. D. – «Nous avons une politique un peu intrusive, positivement, c’est-à-dire que nous aimons les challenger. Prenons l’exemple d’H&M, qui voulait agrandir sa surface. Nous leur avons suggéré d’autres pistes que celles qu’ils envisageaient. Aujourd’hui, ils sont ravis et le magasin cartonne. 

P.-O. D. – «Toujours avec H&M, nous avions appréhendé le besoin en équipements de la maison et nous les avons donc encouragés dans cette voie alors qu’ils n’y avaient pas pensé. Aujourd’hui, H&M Home fonctionne très bien. Nous avons aussi des locataires qui passent d’un bâtiment à l’autre, comme Grand Optical, pour agrandir leur surface. 

La puissance d’attraction d’un centre commercial ne dépend plus uniquement de l’offre commerciale. L’expérience client est importante. Comment faites-vous pour multiplier les motifs de fréquentation? 

T. D. – «Il est clair que le commerce couvre différents aspects dont la qualité d’accueil des clients fait partie. Nous avons notamment ajouté des services à la population, car nous sommes à la croisée des flux entre le site de Belval, l’université, la gare, la Rockhal… Les gens ont besoin de services supplémentaires, avec l’appui de la commune d’Esch. Pour que les habitants de Belval n’aient plus forcément à aller jusqu’au centre d’Esch, nous avons ouvert, il y a un an et demi, un Biergeramt – centre administratif de la Ville d’Esch – et un guichet du Sudstroum, en face des caisses du Delhaize, où les visiteurs peuvent accomplir des démarches administratives classiques. Nous avons aussi convaincu Post de venir s’implanter. Ce sont des services à la population qui sont pour nous très importants, car nous sommes une mini-ville dans la ville. Nous regardons encore à ajouter d’autres services qui pourraient compléter l’offre, comme une conciergerie par exemple.

P.-O. D. – «Nous avons aussi créé un Boudoir, il y a 18 mois. C’est un espace très cosy, ouvert à plusieurs personnal shoppers pour aider les visiteurs dans leur démarche de consommation, en adéquation avec nos enseignes.

Qu’est-ce qui fait l’âme du Belval Plaza, et en quoi est-il différent?

T. D. – «Je dirais que son âme est indissociable de l’environnement qui l’entoure. La zone Esch-Belval est familiale, jeune, estudiantine. L’âme se crée aussi en termes de communication, de marketing. Nous voulons nous intégrer dans le lieu, un lieu historiquement riche, et il aurait été un peu incongru d’avoir un centre qui ne respire pas un peu cet esprit industriel, avec une grande volumétrie, de la lumière naturelle et de grands espaces. Pour moi, il est important de faire partie de cette communauté d’Esch-Belval, car le centre commercial Belval Plaza vit à travers cette communauté.

Les loisirs prennent une place de plus en plus importante dans les centres commerciaux: quelle place pourront-ils occuper au Belval Plaza? Est-ce un axe que vous souhaitez développer? 

T. D. – «Nous avons déjà l’Espace Kids, le Kinepolis, la Rockhal à proximité. Nous réfléchissons à d’autres développements, mais notre taux d’occupation est à 95%, et les loisirs prennent de grands espaces. Dans la zone de Belval, il y aura du loisir complémentaire qui va nous impacter positivement. Au-delà de la question de la rentabilité de ces offres de loisirs, il ne faut pas créer une rupture entre le plaisir et l’achat commercial classique, car si vous allez au cinéma, avez-vous envie d’avoir des sacs remplis de vos achats? Si vous avez un immense parc de loisirs dans un centre commercial, comme à Madrid avec une piste de ski et un karting, les clients fréquenteront-ils les commerces après leurs loisirs? Ça n’a d’intérêt que pour faire connaître un lieu, mais c’est moins redistributeur de bénéfices pour les locataires.

Nous sommes en autosuffisance sur 12% de notre consommation.
Thierry Debourse

Thierry Deboursedirecteurcentre commercial Belval Plaza

Comment intégrez-vous les enjeux de sobriété énergétique et de développement durable dans le développement du Belval Plaza? 

T. D. – «Ça commence par nous-mêmes, nous devons montrer l’exemple, dans le tri par exemple. L’an passé, nous avons installé 4.000m2 de panneaux solaires sur le toit du bâtiment 1, et nous sommes en autosuffisance sur 12% de notre consommation. Nous avons lancé une étude avec un Big Four sur la certification Breeam, pour voir comment le centre peut mieux prendre en compte cet aspect environnemental et intégrer des initiatives telles que la récupération d’énergie ou d’eau de pluie. Il y a aussi d’autres sujets auxquels réfléchir: les ouvertures des portes, l’utilisation de l’eau dans les toilettes… Ce sont des petites choses qui peuvent faire une grande différence. Nous incitons aussi nos locataires à ne pas éclairer les vitrines au-delà d’une certaine heure, à mieux trier… Et nous installons actuellement 23 places de parking pour les véhicules électriques. Sur l’offre de grab’n’go dans le food hall, nous voulons proposer du ‘too good to go’ en fin de journée, avec des prix réduits de 20% pour lutter contre le gaspillage alimentaire.

Pour finir, selon vous, c’est quoi un centre commercial du futur?

T. D. – «L’OCDE prévoit que d’ici 2035, 70% de la population européenne vivra en urbanisation ou en conurbation, c’est-à-dire proche des villes. Cela veut dire que tous les endroits qui permettent aux gens de se connecter seront des lieux intéressants. C’est le cas ici, avec la gare d’Esch-Belval. C’est un centre qui va se situer à la croisée des lieux de vie, avec une offre équilibrée entre du service qualitatif, du commerce classique et de la restauration variée. C’est ce mélange-là qui sera le mélange du futur. Les centres purement de destination inadaptés aux nouveaux modes de vie urbain, vont avoir du mal à se maintenir.»

P.-O. D. – «Pour nous, un des futurs enjeux sera d’améliorer et retravailler les accès sur le Belval Plaza 2, pour mieux faire la liaison entre le centre commercial et l’extérieur. Il y a toujours quelque chose à faire pour améliorer l’expérience client…»