Le bâtiment WKI de la BEI, conçu par Sir Denys Lasdun, va être rénové. (Photo: BEI)

Le bâtiment WKI de la BEI, conçu par Sir Denys Lasdun, va être rénové. (Photo: BEI)

Rare exemple d’architecture brutaliste au Luxembourg, le bâtiment ouest de la BEI au Kirchberg va être rénové. Un projet d’envergure qui devra permettre à ce bâtiment d’atteindre un meilleur niveau d’efficacité énergétique et un meilleur usage de ces espaces.

C’est en 1976 que la construction du bâtiment ouest, dit WKI, de la BEI a débuté au Kirchberg. Une architecture conçue dès 1973 par l’architecte anglais Sir Denys Lasdun, connu et reconnu pour son architecture brutaliste. «Le bâtiment était très novateur quand il a été livré en 1980», explique Sonia Hidalgo, directrice des bâtiments et de la logistique à la BEI. «Il était déjà à l’époque centré sur le bien-être des usagers, par une forte interaction avec la nature environnante, développait un système de gestion du climat avant-gardiste grâce à l’inertie du béton, et proposait une architecture ancrée dans son site, à la fois plus basse que la cime des arbres environnants, et profitant de la déclivité du terrain pour répartir harmonieusement les étages.» 

Cinquante ans après, le bâtiment fait toujours effet et sa conception architecturale reste pertinente. L’utilisation du béton y est particulièrement expressive, comme on peut le remarquer dans le traitement de la façade et les caissons moulés des plafonds par exemple. «Il s’agit du seul exemple d’architecture conçue par cet architecte en Europe continentale», précise Sonia Hidalgo.

Il a été entretenu au fil des années et certains points améliorés progressivement. Mais désormais une rénovation en profondeur s’impose, notamment pour l’isolation ou le système de ventilation. «La rénovation concerne également l’extension qui a été livrée en 1995, aussi par le bureau de Lasdun», précise Sonia Hidalgo.

Vue aérienne du bâtiment ouest et de son extension. (Photo: BEI-Schmitt) 

Vue aérienne du bâtiment ouest et de son extension. (Photo: BEI-Schmitt) 

S’adapter aux besoins d’aujourd’hui

Outre l’efficience énergétique du bâtiment, cette rénovation sera aussi l’occasion de repenser les espaces de travail. «La forme du bâtiment, en croix décentrée, était aussi très novatrice pour une institution à l’époque. Cette forme atypique permet de conjuguer de manière habile les fonctions de représentation, concentrées dans le cœur du bâtiment avec les salles de réception et de conseils, et les espaces de travail répartis dans les quatre ailes qui s’articulent autour de ce cœur. Toutefois, les espaces de travail dans les ailes ne correspondent plus aux modes de travail actuels. Il s’agit d’un long couloir autour duquel se répartissent des bureaux individuels. Aujourd’hui, nos équipes n’ont plus besoin de ce type d’espace. Nous travaillons en système de flex desk, avec des espaces plus ouverts et collaboratifs», explique Sonia Hidalgo.

La salle du conseil est très emblématique, notamment avec son plafond aux caissons en béton. (Photo: BEI)

La salle du conseil est très emblématique, notamment avec son plafond aux caissons en béton. (Photo: BEI)

Une rénovation d’envergure

Mettre en œuvre une telle rénovation ne sera pas chose facile. Le bâtiment et son extension représentent une surface de 78.000 m2 et l’enveloppe extérieure du WKI est à préserver puisque le bâtiment est protégé depuis 2017. Un appel d’offres vient d’être lancé pour déterminer qui sera l’équipe de conception qui accompagnera ce projet d’envergure. «Une des conditions pour répondre à cet appel d’offres est d’avoir de l’expérience dans ce type de rénovation. Il existe quelques exemples de rénovation similaire en Grande-Bretagne, comme pour le Royal National Theater à Londres rénové en 2015, ou l’Institute of Education of University College of London.»

«Bien sûr, nous nous inspirerons de leurs expériences, tout en intégrant nos propres éléments de conduite: une volonté de rester centré sur le bien-être des occupants, comme cela était le cas dans le projet originel, d’assurer la diversité des espaces pour garantir une bonne flexibilité répondant à différents besoins, s’assurer de la durabilité des décisions prises et rendre ce bâtiment aussi efficient que possible, tout en s’assurant d’avoir le meilleur rapport qualité prix. La question de la circularité et du réemploi sera aussi un point important de la démarche. Une partie du mobilier, dont des meubles dessinés par Le Corbusier seront restaurés et réutilisés, tout comme des bureaux et certains placages en bois. Nous sommes une institution européenne, la banque du climat qui plus est, et nous devons être exemplaires dans notre action.» Aussi, des certifications BREEAM et WELL sont envisagées à des niveaux élevés.

Un long processus

Mais avant le démarrage des travaux, il faut établir un business case pour la rénovation, ce qui doit être fait l’année prochaine. Puis le projet sera présenté pour approbation aux différentes instances décisionnelles de la banque en 2026. À ce moment-là, la BEI disposera d’un concept préliminaire qui orientera aussi le budget. Suivront la conception, les plans d’exécution et les travaux. «Je pense que la rénovation pourrait être aboutie vers 2033, mais cela dépendra du type de gouvernance que nous mettrons en oeuvre pour la réalisation du projet», se projette Sonia Hidalgo. 

Actuellement, le WKI et son extension comptent 1.500 postes de travail. Autant de personnes qu’il faudra reloger pendant les travaux. «Pour cela, il faut d’abord terminer notre troisième bâtiment pour qu’il accueille les équipes du WKI. Alors seulement le bâtiment pourra être vidé et rénové.» Au total, la BEI rassemble 5.000 postes de travail au Kirchberg, dont la moitié sont logés dans leurs propres bâtiments et l’autre moitié dans des espaces en location. Une fois les trois bâtiments achevés, la BEI verra alors si elle peut loger l’ensemble de ses équipes dans ses propres locaux ou si des locations seront encore nécessaires.

«En tout cas, ces travaux sont aussi l’occasion de repenser l’ensemble de notre campus au Kirchberg, de réfléchir aux fonctions dont nous avons besoin et où les localiser, à l’intégration d’un centre des visiteurs, à l’accessibilité des zones souterraines, à la circulation à l’intérieur et entre les bâtiments. Nous veillerons également à maintenir ou à améliorer la biodiversité sur le site et à offrir des espaces de travail extérieurs. C’est un projet très important pour nous. C’est aussi un signe d’engagement de la BEI à Luxembourg, de notre volonté de préserver son patrimoine, et de mettre en pratique de que nous demandons à nos clients», conclut Sonia Hidalgo.