En 2024, le secteur européen de l’aviation a presque retrouvé ses niveaux d’avant la pandémie, avec 96% des vols opérés. Les émissions de CO2 aussi ont retrouvé leur niveau d’avant-Covid: 98% des émissions, soit 187,6 millions de tonnes de CO2 pour plus de 8,4 millions d’avions qui ont décollé d’Europe. Pour les vols intra-européens, les niveaux pré-pandémiques ont même été dépassés.
Dans le détail, dix compagnies sont jugées responsables de 40% de toutes les émissions européennes, dont le trio de tête Ryanair (16 Mt CO2), Lufthansa (10 Mt CO2) et British Airways (9 Mt CO2).
La Fédération européenne pour le transport et l’environnement indique aussi que le marché européen du carbone ne parvient pas à prendre en compte le coût réel de ces émissions. Ainsi, 70% des émissions de CO2 de l’aviation sont restées non tarifées en 2024.
D’ailleurs, au début du mois, le directeur général de l’Association internationale du transport aérien (Iata) mettait en garde – dans une interview à Reuters – contre le retard de l’industrie aéronautique en matière de zéro émission nette et que l’objectif intermédiaire de 5% de réduction des émissions d’ici 2030 était, selon lui, inatteignable.

Parmi les compagnies qui ont le plus pollué en 2024, seule Air France a réduit ses émissions, de seulement 1%. (Visuel: T&E)
La Fédération pointe un autre problème: des failles en matière de législation climatique sur l’aviation. Par exemple, selon elle, la liaison la plus émettrice en CO2 était Londres-New York. Une liaison qui échappe à la tarification sur le marché du carbone. Car actuellement, les compagnies aériennes européennes sont soumises à des marchés du carbone qui comportent un bon nombre d’exemptions. C’est-à-dire qu’elles ne paient que les émissions des vols au sein de l’espace économique européen, du Royaume-Uni et de la Suisse, ce qui signifie que les vols long-courriers, les plus polluants, sont exemptés de la tarification du carbone.
L’aviation verte: un fantasme?
La responsable de la politique aéronautique de la Fédération, Krisztina Hencz, ne mâche pas ses mots: «Les émissions du secteur aérien explosent. Comble de malheur, le secteur continue d’esquiver le véritable coût de sa pollution, bafouant ainsi les promesses des compagnies aériennes de devenir plus vertes après le Covid. Si l’Europe continue sur cette voie, l’aviation ‘verte’ restera un fantasme. La révision des marchés du carbone de l’UE, prévue l’année prochaine, est l’occasion de combler une lacune de la législation actuelle et de garantir que les compagnies aériennes paient le véritable coût de leur pollution.»
De leur côté, les PDG des compagnies plaident pour la plupart pour le système de compensation des émissions, qui leur coûterait 23 fois moins cher selon la Fédération.
L’Union européenne s’était en effet engagée à réexaminer son système d’échange de quotas d’émissions. Car l’extension du système d’échange de quotas d’émission pourrait générer des milliards d’euros en faveur de la transition verte, outre les avantages climatiques. Ainsi, la Fédération estime qu’elle aurait pu générer 7,5 milliards d’euros en plus en 2024 si les émissions extra-européennes avaient été tarifées.