L’autotest a pris place en entreprise, même s’il est difficile de chiffrer son utilisation. Il ne se substitue en tout cas pas au télétravail. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

L’autotest a pris place en entreprise, même s’il est difficile de chiffrer son utilisation. Il ne se substitue en tout cas pas au télétravail. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Le déploiement des autotests ne rime pas avec retour au bureau. Beaucoup d’entreprises privilégient toujours le télétravail plusieurs jours par semaine au Luxembourg. Avec une incertitude: la possibilité de le poursuivre ou non au-delà du 30 juin pour les frontaliers. Voire après la crise.

Ces longs cotons-tiges, accompagnés d’un petit boîtier de plastique, ont fait leur apparition dans les entreprises du pays, qu’ils soient placés à l’entrée des locaux ou distribués directement aux salariés. En tout, . Les volontaires les plus rapides les ont donc depuis trois semaines, et les derniers, depuis une semaine.

Vers un retour à la normale…

«Nous n’avons pas encore fait de bilan», déclare , directeur de l’Union des entreprises luxembourgeoises (UEL). On ne sait donc pas encore combien d’entreprises sont venues récupérer leurs autotests, ni combien ont été effectivement utilisés en interne. Mais s’il en reste, il devine qu’ils auront une utilité dans l’horeca, l’école, le sport ou la culture. Il admet qu’il est «difficile» de vérifier que les employeurs les donnent bien ensuite, mais il compte sur le fait qu’un salarié qui n’en reçoit pas puisse interroger son entreprise. Pas de contrôles non plus sur l’utilisation en entreprise, car, même si un salarié se sert de ses deux autotests par semaine pour aller au restaurant, «cela aidera indirectement tout le monde», relativise Jean-Paul Olinger.

En attendant de faire le point avec le gouvernement pour décider d’une poursuite du dispositif ou non, il se dit «content de cette mesure. Elle accompagne, avec la vaccination, l’ouverture qui est en train de se faire vers un retour à la normale.»

Les autotests ont-ils permis un retour plus large au bureau? Chaque entreprise s’organise comme elle le souhaite, mais beaucoup utilisent l’autotest comme un «moyen supplémentaire» de protéger les salariés, avec le télétravail, remarque le directeur de l’UEL. Sur ce point, l’organisation patronale n’émet pas de recommandations spécifiques.

… mais pas encore de retour au bureau

La tendance à faire cohabiter autotests et télétravail se confirme dans les entreprises interrogées. System Solutions en a récupéré 700, distribués par kits de 10 à chaque salarié. À réaliser, en principe, avant de se rendre au bureau, deux fois par semaine au maximum. Même si «on laisse le libre choix aux salariés», rappelle Céline Seré de Lanauze, responsable des ressources humaines dans l’entreprise informatique.

Depuis l’arrivée des autotests, «nous n’avons pas modifié notre règle», affirme-t-elle. Une présence de deux jours par semaine est demandée aux employés depuis février, en essayant de se retrouver avec la même équipe à chaque fois pour réduire les croisements.

«Le casse-tête des RH aujourd’hui, ce sont les décisions qui vont être prises» pour le télétravail des frontaliers. Pour rappel, ces derniers n’ont normalement droit qu’à un certain nombre de jours à domicile par an (19 en Allemagne, 24 en Belgique, et 29 en France) avant d’être imposés dans leur pays de résidence. Et s’ils dépassent 25% de leur temps depuis la maison, ils doivent s’affilier à la Sécurité sociale de leur pays. Des quotas gelés depuis le début de la pandémie par des accords, régulièrement prolongés depuis.

L’entreprise espère que l’accord sera de nouveau prolongé. «Dans l’idéal, nous aimerions poursuivre» le télétravail. Et même après la crise, avec «plutôt trois jours de bureau» par semaine. «Nous n’avons pas vu de baisse de la productivité.» Quand on parle de télétravail, il faut en revanche que ce soit «at home», et pas depuis un lieu de vacances, a défini l’entreprise.

Peu de visibilité pour les frontaliers

«Nous attendons avec impatience d’avoir une réponse», confirme Stéphanie Hayart, directrice des ressources humaines chez CTG IT Solutions. Si le télétravail se limite à partir du 1er juillet, il faudra «réaménager les locaux, voire en trouver d’autres» pour respecter les distances avec les 165 employés sur site de l’entreprise informatique.

Pour le moment, «nous fonctionnons toujours dans un mode de télétravail au maximum», décrit-elle. Et ce, malgré les 10 autotests que chaque salarié peut venir récupérer, s’il le souhaite, à des horaires dédiés. Chacun s’organise selon ses déplacements chez les clients, la direction recommandant deux autotests par semaine en cas de présence sur site. Même si «j’ai l’impression que les gens les utilisent pour aller au restaurant», confie Stéphanie Hayart. Si elle le peut, l’entreprise souhaite privilégier le télétravail jusqu’à la fin de l’année, le temps que tout le monde puisse avoir toutes ses doses de vaccin. Ensuite, «s’il y avait une possibilité d’avoir une journée par semaine, ce serait l’idéal».

J’ai l’impression que les gens utilisent [les autotests distribués en entreprise] pour aller au restaurant.

Stéphanie Hayartdirectrice des ressources humainesCTG IT Solutions

Situation similaire chez PwC, qui s’est vu livrer 33.492 tests pour ses près de 3.000 salariés. Deux par semaine et par personne sont remis à l’entrée. «Nous ne contrôlons pas ce qui en est fait par les employés, nous en distribuons environ 800 par jour, soit la moyenne de fréquentation de notre immeuble», précise le cabinet d’audit et de conseil. «Nous préconisons une présence de 0 à 2 jours par semaine et restons à un taux de présence de l’ordre de 30%.» Le télétravail reste favorisé «tant que les règles fiscales le permettent». Si les accords sont prolongés, les salariés devraient pouvoir télétravailler depuis leur lieu de vacances. «Nous laissons une certaine flexibilité sur le choix du lieu de travail tout en responsabilisant les employés sur ce choix.» Dans le cas contraire, «nous devrons faire face à un manque de place, du fait de la distanciation sociale à respecter», s’inquiète-t-elle.

Généraliser le télétravail après la crise

Le télétravail ne concerne qu’une petite partie de l’effectif des CFL: un dixième des 4.500 salariés. Il reste «autorisé sans limitation pour les agents dont le poste le permet», détaille la Société nationale des chemins de fer luxembourgeois.

Elle a distribué, en parallèle, 20 autotests par salarié au sein de chaque service pour leur permettre d’en effectuer «deux par semaine jusqu’à l’arrivée de l’été» de manière autonome. «Leur utilisation étant facultative, nous n’avons pas d’information exacte concernant le nombre de tests utilisés. Mais nous pouvons néanmoins affirmer que cette action a été accueillie de manière très positive.»

Sans lien avec ces autotests, «un retour progressif dans l’entreprise est envisagé dans le courant des mois prochains, pour arriver progressivement à une réglementation de maximum deux jours par semaine de télétravail pour un collaborateur travaillant à temps plein et dont le poste le permet. Ce projet était déjà en élaboration avant le début de la pandémie, et il sera mis en place au plus tard à la fin de celle-ci.» Reste à savoir si les accords entre pays le permettront pour les frontaliers.