Derrière les dossiers, des humains en situation précaire et qui remplissent une utilité, notamment dans le secteur du nettoyage. (Photo: Shutterstock)

Derrière les dossiers, des humains en situation précaire et qui remplissent une utilité, notamment dans le secteur du nettoyage. (Photo: Shutterstock)

L’Asti anticipe les programmes électoraux de 2023 en rappelant l’enjeu de l’intégration des étrangers et des frontaliers au Luxembourg. Et demande une nouvelle mesure de régularisation exceptionnelle des sans-papiers qui travaillent déjà dans le pays.

La vigilance est toujours de mise à l’égard des réflexes identitaires, «anti-étrangers ou anti-frontaliers de certains responsables politiques, médias ou autres acteurs publics, susceptibles d’alimenter les clivages et la banalisation de la haine».

Réunie en assemblée générale ce lundi 20 juin, l’Asti (Association de soutien aux travailleurs immigrés) autour d’un axe central: «Renforcer le vivre-ensemble dans toutes les dimensions.»

Parmi ses revendications, elle «regrette profondément le refus du ministre de l’Immigration et de l’Asile ( – LSAP, ndlr) de lancer une procédure exceptionnelle de régularisation des personnes vivant et travaillant au Luxembourg sans titre de séjour».

«Le sujet des sans-papiers que nous traitons depuis les années 90 est très peu thématisé, notamment en raison d’amalgames dont il fait l’objet», regrette Sérgio Ferreira, directeur politique de l’Asti. «Or, il est simplement question de permettre à des gens qui travaillent déjà ici – pour certains depuis de nombreuses années – de voir leur situation régularisée.»

Une population active dans différents secteurs économiques, dont le bâtiment, le nettoyage et l’aide à la personne, mais qui reste difficile à chiffrer. La dernière «mesure unique de régularisation» en tant que salarié ressortissant de pays tiers (non-UE) qui fut menée début 2013 en donne une indication pour l’époque. Cette mesure supervisée alors par (LSAP) avait abouti à 664 demandes. 543 avaient reçu un avis favorable.

Une main-d’œuvre nécessaire

Le logement, qui figure parmi les conditions préalables pour obtenir un titre de séjour, pèse particulièrement sur le budget de ces personnes dont la précarité a été accentuée lors de la crise du Covid-19. «Nous avons distribué des bons alimentaires pendant un an et demi à quelque 500 bénéficiaires, célibataires et familles, dont 106 enfants», précise Sérgio Ferreira.

Si la régularisation exceptionnelle permet de stabiliser la situation des personnes concernées, l’Asti ajoute une approche économique à cette problématique.

«Soyons pragmatiques, ces travailleurs sont aussi synonymes d’impôts et de contributions pour l’État», ajoute Sérgio Ferreira, citant l’Irlande, qui mène actuellement une procédure de régularisation. «Nous devons nous donner les moyens pour que notre économie bénéficie de ce phénomène structurel.» Si des facilités sont offertes pour attirer des travailleurs non européens hautement qualifiés, l’Asti demande que les métiers moins qualifiés soient également considérés.


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L’Asti soutient également une refonte de la loi sur la libre circulation et l’immigration avec l’introduction d’un mécanisme permanent de régularisation des étrangers et une réforme de la loi concernant l’accueil et l’intégration des étrangers.

Contacté par Paperjam, le ministère des Affaires étrangères et européennes indique, par la voix d’un de ses porte-paroles, que des conditions de régularisation existent d’ores et déjà dans la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration. Et d’ajouter qu’un groupe de travail, sous l’égide du ministère, a été mis en place pour évaluer la situation des personnes en séjour irrégulier. «Ainsi, des réunions pour échanger sur les dossiers en question ont lieu trois fois par année – également avec la participation active de l’Asti. Dans ce contexte, le ministre adopte déjà une approche très bienveillante et généreuse au cas par cas. De plus, des régularisations ad hoc sont toujours possibles, notamment pour des raisons humanitaires», ajoute le ministère.

Quant à l’éventualité d’une campagne généralisée de régularisation des personnes en séjour irrégulier, elle est «néanmoins exclue, notamment pour ne pas favoriser le travail clandestin par rapport aux voies d’accès légales en matière d’immigration», ajoute le ministère.

L’intégration dans la campagne… et aux urnes

L’assemblée générale a aussi permis à l’Asti de rappeler à la société dans son ensemble, et aux décideurs politiques en particulier, l’importance de l’intégration des étrangers et des frontaliers «au rang des éléments constitutifs du Luxembourg».

Une attention particulière est également portée au racisme, . Et de rappeler sa demande de «création d’un observatoire des phénomènes racistes et xénophobes, organisme de veille et de communication, doté de moyens matériels et humains correspondant à l’importance de l’enjeu».


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Dans une société où le «multiculti» est érigé en élément structurant, la cohésion sociale et le vivre-ensemble demeurent des sujets primordiaux. Quelle place prendront-ils dans les campagnes communale et législative de 2023? Ces dernières représentent a minima une opportunité de retranscrire l’intégration dans la vie publique et politique.

L’Asti recommande ainsi «fortement aux résidents étrangers qui remplissent les conditions de s’inscrire sur les listes électorales et «met les partis politiques au défi de présenter des candidats non luxembourgeois aux élections communales de juin 2023».