Facebook est fâché? Tant mieux! Tant que les mesures prises pour protéger la vie privée de millions d’Européens ou de citoyens du monde ne provoquent que des ricanements des géants de la technologie, c’est qu’elles n’ont aucun intérêt.
Déjà soucieuse de faire de ses produits des appareils «sûrs», Apple a peut-être provoqué un changement majeur, jeudi, à l’occasion de l’intervention de son CEO, Tim Cook, lors de la Journée européenne de la protection des données.
L’information est déjà connue depuis le mois de juin dernier, mais Apple a demandé aux développeurs des applications qui sont hébergées sur son magasin de devenir transparents sur l’usage qu’ils font de nos données, sous peine de ne plus être accessibles. Face à la grogne, la marque à la pomme a tout de même retardé la sanction à la fin janvier, mais tout le monde y est plus ou moins passé.
Plus ou moins, parce que certaines applications renseignent directement dans l’App Store, conformément aux exigences d’Apple, tandis que d’autres emmènent le curieux vers des pages, généralement hébergées sur le site du développeur, avec l’espoir évident de décourager celui qui cherche des informations.
Ce jeudi, jour de la publication de résultats records, le CEO d’Apple a aussi confirmé le lancement, au printemps, d’une nouvelle version de son système d’exploitation qui permettra à l’utilisateur de refuser toute forme de tracking en une fois, ou bien d’être averti à chaque utilisation d’application de ce qui se passe avec ses données.
Dans un document qui accompagne cette mesure – et dans un évident souci de storytelling –, qui raconte l’histoire d’un père qui va se promener avec sa fille pour montrer qu’en moyenne, chaque application que nous utilisons a six trackers qui vont «piquer» des données, que ce soit les contacts, les localisations, les recherches. Le marché des brokers de données est estimé aujourd’hui à 227 milliards de dollars.
Facebook accuse Apple de vouloir gagner plus
«Apple a tout intérêt à utiliser sa position dominante sur la plateforme pour interférer avec le fonctionnement de nos applications et autres applications, ce qu’ils font régulièrement pour préférer les leurs», a déclaré, mercredi dernier, le CEO de Facebook, Mark Zuckerberg, qui s’est payé des pleines pages de publicité pour dénoncer ce changement. «Cela a un impact sur la croissance de millions d’entreprises à travers le monde, y compris avec les prochains changements d’iOS 14.» Zuckerberg a ajouté: «Apple peut dire qu’ils font cela pour aider les gens, mais les mouvements suivent clairement les intérêts de leurs concurrents.»
Selon lui, au lieu d’un modèle d’application qui repose sur la publicité, Apple favorise simplement celles qui reposent sur un abonnement… qui permet à Apple de prendre une commission, et donc de gagner plus d’argent. Loin de l’intérêt des consommateurs sur la protection des données.
Ce jeudi, lors de la conférence, Tim Cook a appelé à être plus exigeants avec les géants de la technologie au sujet de la protection des données personnelles. «La technologie doit être au service des gens», a-t-il dit, «et pas l’inverse». Derrière ce joli message, les développeurs ont déjà trouvé deux parades technologiques pour continuer à pouvoir tracker les utilisateurs, signe que la publicité et le marché de la donnée ont encore de beaux jours devant eux, GDPR ou pas.