Anna-Lena Högenauer est directrice adjointe de l’Institut des sciences politiques et directrice du master en gouvernance européenne à l’Université du Luxembourg. Ses recherches portent notamment sur les questions de gouvernance multiniveaux et de représentation des intérêts régionaux. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Anna-Lena Högenauer est directrice adjointe de l’Institut des sciences politiques et directrice du master en gouvernance européenne à l’Université du Luxembourg. Ses recherches portent notamment sur les questions de gouvernance multiniveaux et de représentation des intérêts régionaux. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Anna-Lena Högenauer se penche sur les enjeux des élections européennes de juin. Des élections qui devraient mettre les questions de souveraineté au cœur des débats.

Quels sont les enjeux de ces élections européennes?

Alors que la campagne se lance, je note un changement de climat politique par rapport à 2019. À l’époque, l’élection était focalisée sur des thématiques environnementales et sociales. Tous les partis – à l’exception des extrêmes – ont fait campagne sur ce terrain. En 2024, la campagne se fera sur des thèmes de droite.

Quels sont ces thèmes?

Il y a d’abord la politique migratoire. Sans nécessairement tomber dans l’anti-immigration, l’heure sera aux solutions pragmatiques: définir les pays qui ont besoin d’aide, préciser plus strictement le statut de réfugié et essayer de trouver les solutions aux problèmes de capacité d’accueil. Il y a ensuite les questions de sécurité: sécurité militaire et sécurité des approvisionnements énergétiques.

Ces thèmes vont-ils mobiliser les électeurs?

Oui. Cette année, le clivage droite-gauche sera plus marqué. Et ce sera une bonne chose. Si on veut contrer la montée de l’extrême droite, il est nécessaire de débattre sur ces sujets. Il faut que les partis centraux s’en emparent et offrent des perspectives. S’ils ne le font pas, les électeurs iront vers l’extrême droite.

Une poussée des eurosceptiques peut-elle mettre en danger l’UE?

L’extrême droite va gagner des sièges, mais il est difficile de prédire le comportement des euroscep­tiques. Leur attitude varie pays par pays. Entre Marine Le Pen et Giorgia Meloni, les différences d’attitudes vis-à-vis de l’Europe sont immenses. À la tête de l’Italie, Giorgia Meloni n’est plus aussi radicale que lorsqu’elle était à la conquête du pouvoir. Elle est désormais plus pragmatique qu’idéologue.

Le système électoral fait que les élections européennes sont une somme d’élections nationales. Les enjeux européens sont-ils visibles pour l’électeur?

Cette fois-ci, il y a de grands thèmes européens que l’électeur voit comme tels. L’immigration, l’énergie, la sécurité… Les gens sont conscients que, sur ces thèmes, il est plus efficace d’agir au niveau européen. En même temps, la vision des électeurs de leur propre gouvernement national va jouer.

Est-ce que le député européen existe?

Cela existe. Il y a des gens qui ont fait leur carrière politique au Parlement européen. Mais il est vrai qu’en moyenne, les parlementaires européens changent un peu plus souvent que les parlementaires nationaux. Notamment parce qu’ils peuvent être remplacés lors de la constitution des listes nationales par d’anciens ministres ou députés battus, en recherche d’emploi. Au Luxembourg, cela va jouer un rôle chez les socialistes et chez les Verts qui ont perdu les élections et qui ont beaucoup de personnalités à recaser. Six députés. Est-ce suffisant pour représenter les intérêts du Luxembourg au Parlement européen? C’est difficile pour tous les repré­sentants de petits États. Il existe 23 commissions permanentes. Couvrir tout le spectre du travail parlemen­taire est impossible pour six députés. En général, ils essayent de couvrir les commissions qui sont jugées impor­tantes par leur famille politique.

Cet article a été rédigé pour l’édition magazine de paru le 24 janvier 2024. Le contenu du magazine est produit en exclusivité pour le magazine. Il est publié sur le site pour contribuer aux archives complètes de Paperjam.

Votre entreprise est membre du Paperjam+Delano Business Club? Vous pouvez demander un abonnement à votre nom. Dites-le-nous via