Jeff Mouton, CEO de Mirabaud & Cie depuis juin 2021, et Sarah Khabirpour, qui intègre le conseil d’administration de filiale du groupe bancaire suisse au Luxembourg. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Jeff Mouton, CEO de Mirabaud & Cie depuis juin 2021, et Sarah Khabirpour, qui intègre le conseil d’administration de filiale du groupe bancaire suisse au Luxembourg. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Sarah Khabirpour intègre le conseil d’administration de Mirabaud & Cie (Europe), la filiale du groupe bancaire suisse au Luxembourg. Elle y rejoint Jeff Mouton, nommé CEO en juin 2021. Le binôme sera en charge de rendre la banque plus visible sur la Place, de faire évoluer sa gouvernance et de réorganiser les activités européennes du groupe. 

La banque , qui revendique fièrement ses 200 ans d’histoire, est un groupe suisse basé à Genève et appartenant à quatre associés gérants – essentiellement la famille Mirabaud – qui en assument la direction. Spécialisé dans le wealth management, l’asset management et la corporate finance, il emploie 700 personnes et est présent dans 10 pays. Mirabaud & Cie (Europe) a été créé en 2014 pour être la plateforme européenne du groupe et est la maison mère des trois succursales européennes installées en France, en Espagne et au Royaume-Uni. Cet ensemble emploie une centaine de personnes, dont une quarantaine basées au Grand-Duché.

Jeff Mouton détaille: «Nous travaillons actuellement sur un projet de réorganisation au terme duquel ces succursales cesseront d’être des booking centres, pour se consacrer à une activité locale, de gestion et de conseil aux clients. L’activité de tenue de compte à proprement parler sera consolidée au Luxembourg. Nous souhaitons simplifier notre structure et nous concentrer pour mieux croître ensuite.»

2022, année de réorganisation

Cette réorganisation vient de commencer et devrait s’achever début 2023. Elle s’accompagnera, en parallèle, du remplacement de l’actuelle plateforme bancaire européenne du groupe, une vénérable AS-400, par un nouvel écosystème de solutions bancaires digitales, permettant de servir les clients grâce aux meilleurs outils.

«Nous ne voulons pas seulement être la plateforme juridique européenne du groupe, mais véritablement créer une plateforme qui puisse servir toutes ses entités à l’international.»

L’évolution est également à l’agenda pour ce qui concerne les produits. Et plus particulièrement sur les fonds private equity et real estate où l’idée est de «répliquer au niveau de nos produits ce qui fait notre ADN: l’approche entrepreneuriale. Nous co-investissons avec nos clients, souvent des groupes familiaux».

Il flotte sur ce programme un vent de jeunesse… «Sur quatre associés, deux sont dans leur quarantaine. Avec cette nouvelle génération, il est normal que le groupe évolue», poursuit Jeff Mouton. «Le groupe est en train de se repositionner, revoit son offre de banque privée et veut donner une image plus claire de celle-ci.»

L’avantage de la banque, son élément différenciateur, selon Jeff Mouton, c’est sa taille qui permet des prises de décision rapides et stables dans le temps, mais aussi sa philosophie d’entreprise familiale. «Pour les associés, l’objectif principal n’est pas une rentabilité immédiate, mais un développement durable afin de pouvoir remettre la banque à la prochaine génération d’associés en meilleur état que ce qu’elle est aujourd’hui. Les décisions sont prises avec des objectifs de long terme.»

Visibilité et gouvernance

Outre le pilotage de la réorganisation, Nicolas Mirabaud, associé gérant du groupe et président du Conseil d’administration de Mirabaud & Cie (Europe), a confié deux autres missions stratégiques à Jeff Mouton. La première: être le porte-parole du groupe sur la Place, d’être plus visible, de mieux s’insérer dans la communauté et de se doter d’une politique de communication externe.

Jusqu’à présent, Mirabaud était restée sous les radars et ne participait pas à la vie associative bancaire. «On ne sera jamais une grande banque de la Place et ce n’est pas le but. Mais dans la niche que nous souhaitons occuper, nous devons faire savoir qui nous sommes. Pour attirer de nouveaux clients, il faut attirer de bons banquiers. Pour attirer ces banquiers, il faut que l’on se donne la notoriété qu’il faut. Il faut que l’on génère de la curiosité, de l’intérêt. À Genève, Mirabaud a un positionnement clair, basé sur l’esprit entrepreneurial de la famille, un service sur mesure et de qualité, de fortes expertises, une culture et des valeurs alliant tradition et modernité. C’est cela que l’on veut travailler au Luxembourg.»

La deuxième mission touche à la gouvernance que Nicolas Mirabaud veut faire évoluer vers plus de modernité et plus de productivité.

Et c’est là qu’entre en scène . «Au-delà de la simple technique, nous avons voulu nous doter d’un administrateur indépendant, spécialiste de la question et qui, en même temps, nous aide à avoir plus de visibilité au Luxembourg.»

Le plus des administrateurs indépendants

À pied d’œuvre depuis octobre, l’intéressée se dit très motivée par le défi à relever. «La taille du groupe, dans un contexte réglementaire, où les charges sont extrêmement élevées, est, en soi, un défi. Où se situe le seuil pour être un groupe avec un business plan soutenable? Le “challenge business” est passionnant. C’était intéressant pour moi de comprendre avec le “background” que j’ai comment une banque de cette taille se positionne dans un contexte actuel», explique-t-elle. «Et puis évidemment, aujourd’hui, tout ce qui est réglementaire, c’est “top of the agenda” dans toutes les banques. Je pense que je peux essayer d’apporter quelque chose dans cette matière-là.»

Une nouvelle dynamique anime le Conseil d’administration de Mirabaud & Cie (Europe). «Jusqu’ici composé de trois représentants du groupe, son fonctionnement était celui que l’on voit dans beaucoup d’organisations où il n’y a que des représentants de la maison: un rôle un peu plus formel, théorique et moins orienté pratique que ce n’est le cas maintenant, en s’ouvrant à des compétences externes. Je pense qu’il y aura désormais une implication très forte dans nos travaux par rapport à la gouvernance réglementaire», décrit Jeff Mouton.

«Je pense que d’une manière générale, la gouvernance est un sujet pertinent dans toutes les banques. Il y a, je crois, une prise de conscience qu’il faut renforcer la gouvernance et aussi le rôle du conseil d’administration. Ce n’est pas nécessairement nouveau, mais cela quitte la sphère du théorique pour devenir une “market practice” qui  améne des expertises externes et enrichi la qualité de la gouvernance. Le fait d’ajouter des administrateurs indépendants, même si ce n’est pas obligatoire pour toutes les banques – et ce ne l’est pas pour Mirabaud – est un signe fort», poursuit Sarah Khabirpour.

Pour elle, «la profitabilité d’une banque est aussi un souci presque réglementaire». Dans son rôle, elle se veut créative. «Une créativité qui combine la conformité réglementaire et la saine profitabilité.»

Cet article est issu de la newsletter Paperjam Finance, le rendez-vous mensuel pour suivre l’actualité financière au Luxembourg.