Pour Roberto Mendolia, la liberté syndicale n’est plus assurée. La restaurer est son cheval de bataille pour 2024. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Pour Roberto Mendolia, la liberté syndicale n’est plus assurée. La restaurer est son cheval de bataille pour 2024. (Photo: Romain Gamba/Maison Moderne)

Au moment de célébrer son 105e anniversaire, l’Aleba se met en ordre de marche avec un double objectif: être reconnue comme un syndicat national après les élections sociales du 12 mars prochain et contribuer à faire réformer les lois syndicales luxembourgeoises actuelles jugées «antidémocratiques».

Le 9 novembre est une date symbolique pour l’Aleba: la date de sa naissance en 1918 et de sa «renaissance» en 2020. Le 9 novembre 2020, c’est le jour où est trouvé un accord de principe entre le syndicat des banques et des assurances, l’ABBL et l’Aca, sur la réforme des conventions collectives de travail (CCT) du secteur financier. Un accord dénoncé par l’OGBL et le LCGB qui ripostent en demandant au ministre du Travail, (LSAP), de suspendre la représentativité sectorielle de l’Aleba. .

Une injustice pour , son président, pour qui l’accord qui a déclenché cette suspension n’en était pas un. «Il s’agissait d’un préaccord dont le but était de rassurer la Place sur le fait qu’il n’y aurait pas de crise durant la crise Covid. Il fallait que tout le monde soit conscient que nous allions partir sur une renégociation saine des conventions collectives à partir des précédentes alors que beaucoup d’entreprises ne respectaient plus les CCT cause de la crise et voulaient en profiter pour revenir sur de nombreux droits acquis au nom des incertitudes engendrées par la pandémie. Cela n’a pas voulu être compris comme cela par les deux syndicats nationaux.»

L’Aleba attend le nouveau gouvernement

La crise qui s’en est suivie donne à l’Aleba la «légitimité» pour dénoncer les actuelles lois syndicales qu’il considère comme «discriminatoires, voire anticonstitutionnelles. Des lois qui protègent les syndicats nationaux et qui permettent d’exclure de la table des négociations des représentants élus. Des lois d’une autre époque». Pour Roberto Mendolia, il faut réformer le principe de la représentativité ainsi que le mode de fonctionnement de la Chambre des salariés et tout particulièrement le système des collèges dont la composition ne reflète pas – ou plus – l’importance des secteurs d’activité dans l’économie.

Alors que le syndicat menaçait au printemps dernier pour se faire de saisir la Cour européenne des droits de l’Homme après le refus du Tribunal administratif de lui rendre la représentativité sectorielle, cette saisine n’est plus à l’ordre du jour. «Nous attendons la formation du nouveau gouvernement.» Un gouvernement dont Roberto Mendolia espère avant tout «qu’il aura le courage politique de réformer».

3% d’adhérents en plus en six mois

L’Aleba ne compte pas uniquement sur le gouvernement et les tribunaux pour retourner son rang. Elle compte également peser sur les élections sociales de ce 12 mars.

Et la ligne de mire n’est pas réglée sur la représentativité sectorielle, mais sur la représentativité nationale, chasse gardée de l’OGBL et du LCGB.

«La représentativité n’a plus rien à voir avec la négociation des conventions collectives. Cela a totalement été séparé. Font d’office partie de la table de négociation d’une CCT les syndicats dits nationaux. Et normalement ceux qui ont une représentativité sectorielle ou qui peuvent justifier de 50% des voix dans le champ d’application de la convention collective. Ce qui est notre cas. La représentativité sectorielle ne nous intéresse pas. On peut même dire que c’est de la poudre aux yeux. Ce qui nous intéresse désormais, c’est la représentativité nationale. Nous avons d’ailleurs déjà des élus dans d’autres secteurs, le commerce notamment…»

C’est pour atteindre ce but que le syndicat a décidé de s’ouvrir en mars dernier à tous les secteurs d’activité économique. Depuis cette annonce, le syndicat qui compte aux alentours de 10.000 membres annonce une progression de 3% des adhésions. La jeunesse peu syndiquée est particulièrement visée et réceptive.

Les neutres parlent aux neutres

Pour devenir un syndicat national, il faut recueillir 20% des voix à la Chambre des salariés. «Obtenir 20% à la Chambre des salariés, c’est compliqué. Il faut réussir à présenter 120 candidats – soit 60 candidats et autant de suppléants – et les faire élire. Notre ambition est de retrouver notre majorité absolue dans le secteur financier et de percer dans les autres. Devenir un syndicat universel est la bonne stratégie. Comme les autres veulent entrer chez nous, nous voulons entrer chez eux. Nous n’avons pas peur de grandir. Nous avons une structure qui est viable.»

Les élections sociales servent à désigner les membres de la Chambre des salariés. Mais elles sont aussi sur le terrain l’occasion d’élire les délégations sociales dans les entreprises. Au Luxembourg, 58% de ces délégations sont des délégations neutres. Autrement dit ne se revendiquant ni de l’OGBL, ni du LCBB pas plus que de l’Aleba. «La loi ne donne pas à ces délégations neutres le droit de représentation ou de négociation, sauf si elles totalisent plus de 50% des voix. Nous cherchons à attirer ces délégations neutres. Nous nous considérons comme un syndicat neutre politiquement. Et nous leur disons plutôt que d’être neutre dans votre coin, soyez neutre avec nous et ensemble nous allons construire un grand syndicat au seul service des travailleurs.»