L’idée était dans les tuyaux depuis quelques mois. Mais ce mardi 21 mars, l’ALEBA, syndicat sectoriel numéro un sur la Place financière, saute officiellement le pas et veut devenir un syndicat multisectoriel.
«Nous voulons devenir un syndicat national… si on ne l’est pas déjà», explique sans détour l’actuel président, , qui a en ligne de mire la représentativité nationale dont le syndicat a été privé en mars 2021 par le ministre du Travail de l’époque, . Une privation que le président considère comme une atteinte à la démocratie et à la liberté syndicale, en rappelant le jugement de l’Organisation Internationale du Travail du 22 novembre dernier qui condamne l’actuel système luxembourgeois relatif à la représentativité syndicale.
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Pour lui, les lois de 2004 qui traitent des problèmes actuels de représentativité ont été faites par le gouvernement afin de n’avoir que peu d’interlocuteurs face à lui. Quitte «à fermer la porte à tout syndicat politiquement neutre comme l’ALEBA», commente Roberto Mendolia. Conséquence: sur les 4.189 entreprises que le syndicat recense, 1.086 n’ont pas communiqué les résultats des leurs élections sociales et dans les 3.103 autres, 57% des délégations ont refusé de choisir entre LCGB et OGB-L, «deux syndicats politisés».
«Dans ces conditions, comment un ministre peut-il déclarer un syndicat représentatif et l’autre pas?», s’interroge-t-il en réclamant le changement d’une législation «dangereuse pour la démocratie et la pluralité des opinions».
C’est donc pour peser sur le prochain gouvernement que l’ALEBA joue la carte du multisectoriel.
La solution à 57%
Comment? Pour l’ALEBA, ces 57% de délégations neutres sont autant d’affiliés potentiels.
Afin de les convaincre de se rallier à la bannière ALEBA pour les élections sociales du 12 mars 2024, le syndicat met en avant sa neutralité politique «qui permet d’apporter des solutions positives au pays» et l’expérience acquise dans le secteur financier. «Secteur où les problématiques sont transposables à beaucoup d’autres secteurs de l’économie». Et de citer en exemple le télétravail, la réduction du temps de travail – qui pour le syndicat est nécessaire au nom du bien-être des salariés – ou les problèmes des frontaliers.
Concrètement, l’idée est de fonctionner en silos en en créant de nouveaux au fur et à mesure du ralliement de nouveaux secteurs.
Actuellement, le mode de fonctionnement de l’ALEBA fait que les dirigeants du syndicat sont les délégués du personnel – «L’ALEBA ne dépense pas d’argent en salaires pour ses dirigeants». «Les délégués des nouveaux secteurs qui rejoindront l’ALEBA seront, de fait, les dirigeants de ces branches au sein de notre syndicat. Nous leur donnerons les moyens d’action et les outils nécessaires», détaille Roberto Mendolia.
L’association compte également jouer la carte jeune. Une population peu syndiquée, parce que «peu consciente de l’importance du travail syndical». Pour les attirer, le syndicat annonce la gratuité des cotisations pour les moins de 30 ans.
Et des coordinateurs du syndicat sont déjà sur le terrain pour convaincre les délégations neutres. Le temps presse, car les listes pour l’élection à la Chambre des salariés doivent être déposées d’ici à novembre prochain.
Pour surfer sur cette vague de changement, l’ALEBA a refondu son site internet et a adopté un nouveau logo symbolisant un porte-voix. «Celle de ceux qui ne se reconnaissent pas dans l’offre syndicale bipartisme du Luxembourg».