Roberto Mendolia, le président de l’ALEBA, ne peut admettre la perte de représentativité sectorielle de son organisation, fruit de «petits jeux politiques». (Photo: Nader Ghavami/Archives)

Roberto Mendolia, le président de l’ALEBA, ne peut admettre la perte de représentativité sectorielle de son organisation, fruit de «petits jeux politiques». (Photo: Nader Ghavami/Archives)

Le tribunal administratif de Luxembourg examinera ce jeudi une requête en référé de l’ALEBA afin de suspendre la décision du ministre du Travail, Dan Kersch, de priver le syndicat de sa représentativité sectorielle. Mais pour Roberto Mendolia, l’enjeu réel est bien plus important. 

L’audience de ce jeudi au tribunal administratif est une première action, mais ce n’est pas la seule. Comment s’organise la réplique de l’ALEBA à la décision prise en mars par , ministre du Travail (LSAP)?

. – «Pour rappel, saisi par les syndicats LCGB et OGBL, le ministre du Travail nous a retiré notre représentativité sectorielle, en tant que syndicat des employés des banques et assurances (, ndlr). Une décision qui nous a choqués et que nous contestons, prise après une enquête de l’ITM bâtie autour de 12 questions simplistes comme ‘quel est votre budget?’, ‘quel est votre rôle?’… Nous n’avons pas été entendus, nous n’avons pas pu nous défendre. Dès lors, nous avons introduit une requête en référé afin d’obtenir la suspension de la décision, qui sera l’objet de cette audience, et cela dans l’attente d’un jugement au fond, qui a fait l’objet d’une autre action en justice en raison du préjudice qui est le nôtre. Enfin, nous avons aussi saisi l’Organisation internationale du travail. 

La politique, c’est le choléra du syndicalisme.
Roberto Mendolia

Roberto MendoliaprésidentALEBA

Vous estimez que la représentation syndicale est biaisée au Luxembourg?

«C’est un fait. J’ai relevé pas moins de 34 lois où, curieusement, l’appellation de syndicat sectoriel a été oubliée. Ce qui met systématiquement les syndicats nationaux, comme le LCGB et l’OGBL, en position de force. Certains textes sont même surréalistes. Ainsi, il faut 20% de membres de la Chambre des salariés pour pouvoir être un syndicat national. Donc si un jour il y a au Luxembourg 10 syndicats qui ont 10% des membres, il n’y aura… plus de syndicat national. 

Mais en réalité, il faut parler de véritable discrimination via ces lois qui avantagent les syndicats nationaux, par exemple en ce qui concerne la libération des délégués.

Autre exemple: quand le Comité économique et social étudie la question du télétravail, les syndicats nationaux sont invités, mais plus nous. Or, nous représentons un secteur très important où 95% des employés télétravaillent. C’est aussi incroyable qu’injuste. Nous sommes purement et simplement exclus.

 en 2019, j’ai été sidéré. C’est pour cela que nos actions en justice sont bien plus importantes que le seul cas de l’ALEBA. Le vrai enjeu, c’est celui de la liberté et de la représentativité syndicale dans ce pays.

Pourquoi en veut-on à ce point à l’ALEBA?

«Il y a beaucoup de petits jeux politiques derrière tout cela… Et la politique, c’est le choléra du syndicalisme. L’ALEBA dérange, car elle travaille pour les gens, obtient des choses, les défend. La représentativité sectorielle ne plaît pas à tout le monde. Nous représentons près de 50% des employés de la place financière, mais on veut nous mettre de côté. Mais nous ne sommes pas les seuls dans ce cas. Un jour, on écartera de la table l’Association luxembourgeoise des pilotes de ligne quand on discutera du secteur aérien, car ce n’est pas un syndicat national. Oui, on en arrivera à discuter du secteur aérien sans que les pilotes soient représentés, c’est vers cela que l’on va au Luxembourg.

C’est quant à la convention collective du secteur bancaire qui a mis le feu aux poudres…

«Mais rien n’a jamais été signé! Nous avions trouvé un accord pour commencer à négocier, c’est tout. Mais les autres ont vu là une opportunité de nous exclure. Sans doute car nous avions obtenu des avancées significatives sur bien des points. 

D’ailleurs, avant, personne ne voulait nous parler, mais tout le monde le veut depuis que le ministre a pris sa décision.

L’ALEBA, malgré ce contexte, poursuit son travail…

«On a toujours négocié pour les gens et personne ne peut nier que l’ALEBA a amélioré les conventions collectives, sur le 26e jour de congé, sur les frais liés au télétravail. Nous, on veut avancer, pas discuter des heures en plénière sur la place d’une virgule pour des raisons politiques. Il y a d’autres urgences pour le moment dans notre secteur.

Alors que l’on discute depuis longtemps et que des choses ont été obtenues, les autres veulent imposer un troisième cahier de revendications globales et menacent de ne plus négocier. J’ai, pour ma part, pris mes responsabilités et j’ai dit que moi, en tout cas, j’allais continuer à négocier.

Vous n’êtes plus dans le même camp?

«Si, évidemment et heureusement, on se retrouve souvent finalement via la négociation. Mais des choses nous opposent aussi, c’est clair. L’ALEBA a en tout cas des revendications claires et s’y tiendra. 

Le départ de de son poste de secrétaire général Qui va le remplacer?

«Laurent était quelqu’un de précieux, expérimenté, et son départ est évidemment difficile. Je veux me laisser le temps de choisir la bonne personne. Qui devra correspondre à notre moule, être bien dans son rôle, apporter des idées et être force de proposition, qui saura s’exprimer aisément… Il y a plusieurs candidats et c’est très bien, mais je ne veux pas agir dans la précipitation.»