Pouvez-vous nous présenter votre spectacle «Ombra»?
«Pour l’expliquer de manière très simple et résumée, il s’agit d’un groupe de personnes qui se réunit autour d’un arbre, qui y reste longtemps et qui commence à avoir des interactions. Il s’agit d’une commande du directeur de l’Opera Ballet Vlaanderen, qui après l’expérience de ‘C(h)œurs’ souhaitait poursuivre la recherche entre les danseurs et le chœur. C’est aussi un hommage à mon ami Gérard Mortier (ancien directeur, entre autres, de La Monnaie de Bruxelles, du Festival de Salzbourg, de l’Opéra national de Paris ou encore du Teatro Real de Madrid, ndlr) qui est décédé il y a maintenant 10 ans. J’ai aussi eu la chance de pouvoir travailler en amont avec les danseurs. L’Opera Ballet Vlaanderen nous a en effet laissé la possibilité d’avoir des séances de travail mensuelles pendant un an ce qui nous a permis de beaucoup échanger avec les danseurs et travailler les improvisations. C’est une manière de travailler que j’apprécie beaucoup, de pouvoir faire évoluer les pièces de manière collaborative et collective. Je dois aussi préciser que tous les danseurs qui participent à cette pièce le font de manière volontaire, ce qui n’est pas si fréquent puisqu’habituellement c’est le chorégraphe qui les choisit.
Au centre de la scène, il y a un arbre impressionnant, imaginé par la plasticienne Berlinde De Bruycker. Pouvez-vous nous en dire plus sur cet objet singulier et de votre collaboration avec Berlinde De Bruycker?
«Je connais Berlinde depuis plus de 15 ans. C’est une amie et nous avons déjà travaillé ensemble sur plusieurs projets. Aussi, quand je lui ai demandé de travailler à nouveau avec elle pour ce projet, elle a tout de suite dit oui. J’avais envie de représenter Gérard Mortier sur scène et cette idée de l’arbre est venue. Il a la particularité de disparaître de la scène de manière subtile et progressive: au fur et à mesure de la représentation, il s’enfonce tout doucement dans le sol.
La musique a aussi une place très importante dans ce spectacle. Comment avez-vous envisagé cet accompagnement musical et la place que vous lui réservez?
«J’ai donné carte blanche au compositeur Steven Prengels. En fait, sa musique a précédé tout le reste de la création. C’est à partir de sa composition que nous avons monté le reste du spectacle. Je lui avais donné toutefois quelques indications, car je souhaitais vraiment travailler avec trois musiques. La première est ‘Ombra mai fu’ de Händel. J’avais déjà utilisé ce morceau au début des années 1990 dans une de mes premières chorégraphies et j’avais très envie de travailler de nouveau avec. La deuxième est ‘Soave sia il vento’ du 'Cosi fan tutte’ de Mozart. Et la troisième est l’’Agnus Dei’ de Samuel Barber. À cela, Steven Prengels a ajouté d’autres musiques de Beethoven, Bach…
Associer danse, chœur et orchestre n’a pas dû être chose facile et surtout un équilibre difficile à trouver pour que l’un n’écrase pas l’autre… Quel langage chorégraphique avez-vous souhaité par conséquent développer pour ce spectacle?
«Le travail avec le chœur est un travail très agréable à faire. C’est une rencontre rare et j’étais ravi de pouvoir l’expérimenter à nouveau. Le chœur et les danseurs sont très engagés physiquement et pour ‘Ombra’, je voulais les faire travailler autrement. Aussi, je leur ai proposé d’apprendre et interpréter tout le texte des airs d’opéra en langue des signes. Pour cela, nous avons travaillé avec une personne sourde qui nous a permis de traduire et apprendre le texte. Il nous est parfois demandé d’avoir des interprètes en langue des signes sur scène. Aussi, j’ai eu cette idée d’intégrer directement cette langue dans la chorégraphie.
Quant à l’équilibre entre tous les éléments, c’est un travail qui se fait au jour le jour, que l’on découvre progressivement. C’est comme faire de la dentelle. Il faut prendre en considération ce que souhaitent les danseurs, ce qui est exprimé par la musique. Je n’ai pas de recette toute faite, mais nous avons parfaitement utilisé le temps qui nous était donné en studio.
Il est annoncé que ce spectacle sera probablement votre dernière production. Est-ce exact?
«C’est ce qu’on dit en effet. Je suis en effet en retraite depuis quelques années, mais un créateur ne s’arrête jamais, vous savez… Je ne suis en effet pas en train de chercher d’autres projets, mais je reste à l’écoute si jamais un projet me plait.»
, vendredi 17 et samedi 18 janvier, à 20h.