Les entreprises ont davantage sollicité les aides directes que les reports de paiements ou garanties de l’État, ce qui diminue le risque de surendettement. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Les entreprises ont davantage sollicité les aides directes que les reports de paiements ou garanties de l’État, ce qui diminue le risque de surendettement. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Moins d’un quart des aides budgétisées par le gouvernement ont été utilisées, analyse l’économiste Michel-Edouard Ruben. Ce qui laisse une certaine marge de manœuvre pour d’éventuelles prolongations de soutien aux entreprises face à la crise, ou pour la relance.

La Fondation Idea a son recueil . 18 contributeurs y ont écrit sur des thèmes comme la fiscalité, le marché immobilier, le télétravail… Parmi eux, les économistes Narimène Dahmani et Michel-Edouard Ruben ont cosigné un chapitre intitulé «Soutenir autant que nécessaire, c’est combien!». Ce dernier nous en dit plus sur leur analyse des aides apportées par le gouvernement en pleine pandémie…

Soutenir autant que nécessaire?

«Au moment où est arrivée la crise, l’État a dit:  ‘on va soutenir autant que nécessaire’. Deux plans ont été annoncés: un plan de stabilisation (Stabiliséirungspak) et un plan de relance (Neistart Lëtzebuerg). Fort heureusement, tout ce qui a été annoncé – 11 milliards d’euros – n’a pas été dépensé (mais «seulement» 2,5 milliards d’euros au premier trimestre 2021, ndlr). Cela veut dire que l’économie a pu se tenir.

Quand on analyse plus finement ce qui a été fait, on remarque que les aides directes (dont font partie les avances remboursables, ndlr) ont été utilisées à hauteur de 52%. Cela comprend le chômage partiel, qui a aidé à conserver salaire et emploi, mais aussi les entreprises qui n’ont pas eu à se débarrasser de leurs salariés pour éventuellement les réembaucher après – ce qu’il se passe aux États-Unis, qui n’ont pas ce système. Et aussi les fonds de relance, la prise en charge des coûts non couverts, les indemnités aux indépendants, etc.

Alors que les mesures de garantie (de l’État pour des prêts) et de report (d’impôts, de cotisations sociales, etc.) ont été très peu utilisées. Cela peut être vu comme une bonne chose, car on peut supposer que le risque de surendettement des entreprises et de zombification, dont on parle beaucoup, sera moindre.

Avec tout cela, peut-on dire que l’État a soutenu les entreprises et indépendants «autant que nécessaire»?

«Une façon de répondre à cette question est de comparer la performance des entreprises et de l’économie du Luxembourg à celle des autres pays. On voit que cela a quand même permis d’accompagner de façon très habile l’économie, qui a bien résisté. Il y a eu de l’emploi créé, la récession a été moins profonde que dans les autres pays, et l’économie rebondit bien.

Il y a aussi la partie marge de manœuvre. Ce qui a été annoncé a été sous-utilisé, mais cela veut dire qu’au besoin, il y a encore dans les caisses pour agir, ce qui est quand même très rassurant.

Quel soutien reste nécessaire?

«C’est toute la question, sans réponse. La politique économique, c’est aussi de l’art. Nous discutons des pinceaux avec le gouvernement, mais c’est lui qui peint le tableau. Le principe, c’est de soutenir autant que nécessaire. Ce n’est pas combien il faudra, mais ce qu’il faudra faire, on le fera, autant que nécessaire.

Jusqu’à quand? Pour qui?

«Il y a des secteurs qu’il faudra plus ou moins arrêter d’aider, d’autres qu’il faudra continuer à aider. Encore une fois, toute la question est: est-ce qu’il y a les marges de manœuvre pour le faire? Est-ce qu’il y a assez dans les caisses pour le faire? Et est-ce qu’il y a la volonté de le faire? Je crois que la réponse à toutes ces questions, c’est oui.

À côté de cela, la meilleure politique économique à mener, c’est la fin de l’épidémie. La vaccination, et qu’elle marche.»