La Commission interdépartementale du développement durable a publié le rapport national de mise en œuvre de l’Agenda 2030, des Nations Unies. Il présente un état des lieux des dix priorités nationales du Plan national de développement durable, le document de base qui définit la vision à long terme du pays en mati§re de développement durable.
Il s’appuie notamment sur 112 indicateurs et montre «une progression vers une durabilité accrue dans 70% des objectifs étudiés», est-il mentionné dans le rapport. Ce qui signifie que le pays est en bonne voie, mais que, dans les six ans qui restent, le gouvernement devra accélérer dans la mise en œuvre de la plupart des objectifs de développement durable (ODD), mais aussi travailler à inverser les tendances négatives.
Des progrès
Dans le domaine de l’énergie, le Luxembourg a réalisé des progrès notables. Le rapport souligne par exemple que l’intensité énergétique est en amélioration constante depuis 2004 et que la part des énergies renouvelables connaît une croissance exponentielle». Elles représentaient 14% de la consommation totale en 2022., «Il semble aussi que le pays pourra dépasser le but fixé en matière d’énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie alors même qu’il a été relevé entretemps de 25 à 37%», est-il mentionné dans le rapport.
Par ailleurs, les émissions de CO2 dans le secteur manufacturier sont en diminution constante depuis 2009. «Le Luxembourg mise beaucoup sur l’innovation, la recherche et les filières d’excellence pour promouvoir une industrie durable, mais peu de résultats positifs sont observés», tempère le rapport qui indique aussi qu’en 2021, les émissions de gaz à effet de serre ont été réduites de 32,4% par rapport aux émissions de l’année 2005, année record pour le Luxembourg. Les émissions des secteurs qui ne sont pas couverts par le système d’échange de quotas d’émissions connaissent également une tendance favorable avec une réduction de 22,6% depuis 2005».
La consommation et la production responsables sont aussi considérées comme un progrès, avec une économie verte et circulaire qui se développe au Luxembourg et une forte augmentation de la production de biens et de services durables? «Le traitement des déchets municipaux par recyclage, compostage et récupération d’énergie est en progression constante, atteignant, en 2021, un taux de 93,9%», illustre le rapport.
Et des lacunes
Il faut aller encore plus loin sur les efforts en matière d’action climatique, notamment concernant le transport et la promotion d’une mobilité plus durable, alors que la croissance démographique entraîne une demande accrue en mobilité. Le rapport indique que, pour 2035, il faudra pouvoir gérer 40% de déplacements supplémentaires par rapport à 2017. Pour autant, l’utilisation des transports publics progresse trop peu. En 2021, seulement 13,7% des voyageurs avaient recours aux transports publics malgré des investissements réguliers du gouvernement dans les infrastructures de transport terrestre et la mise en place de la gratuité, un élément incitatif pourtant fort. 69% des déplacements se font aujourd’hui encore en voiture, avec tous les problèmes que cela engendre? Deux tiers des émissions de GES du pays proviennent du secteur des transports. Par ailleurs, le pays est le deuxième pays le plus motorisé du monde. Un des objectifs demeure que 22% des déplacements domicile-travail se fassent en transport en commun et 13% à pied ou à vélo. Par ailleurs, le gouvernement projette que d’ici 2030, 49% de la flotte des véhicules soient électriques ou hybrides.
Du côté de l’agriculture, le bio, considéré comme la meilleure façon de maintenir la durabilité et la productivité des sols, est en augmentation constante. «La part de la surface agricole utile convertie en agriculture biologique est en augmentation lente, mais continue depuis plus de 20 ans (6,9% en 2022)», est-il détaillé. Mais il faudra aller plus loin puisque l’objectif fixé est de 20% d’ici… la fin de l’année. Plus ambitieux encore, le pays s’est engagé à diriger la production agricole vers le 100% biologique en 2050 et à réduire l’utilisation des produits phytosanitaires soit déjà réduite de moitié d’ici 2030.
Sur le plan financier, aussi pris en compte, la part des taxes environnementales dans le revenu fiscal total continue de diminuer (3,2% en 2022) alors que le revenu de ces taxes ont augmenté en valeur absolue. Pourquoi cette contradiction? «Cette diminution relative démontre l’absence de transfert de charge fiscale des revenus du travail vers les comportements défavorables à l’environnement tel que recommandé par le pacte vert européen», précise le rapport. En lien avec cela, le taux de risque de pauvreté ou d’exclusion faisant partie des objectifs majeurs reste un élément sensible. Ce taux est en augmentation constante depuis vingt ans et a atteint 19,4% en 2022.
La gestion de l’eau reste un point critique. Car si en termes d’efficacité, la gestion opérée est en amélioration régulière, avec un indice de stress hydrique stable; le pourcentage des masses d’eau de surfaces naturelles ayant atteint un état jugé de satisfaisant n’était que de 49,1%, soit une baisse de 17,2% sur dix ans. Ce qui signifie que l’état des masses d’eau, ressource précieuse, tend à se dégrader.
Aller plus vite, et plus loin
Compte tenu du temps relativement court restant avant la mise en place de l’Agenda 2030, la Commission interdépartementale du Développement durable propose deux pistes qui devraient être «faciles» à mettre en œuvre.
Il faudrait, selon elle, mieux appliquer le check-durabilité. Cet outil prévu dans le PNDD et en place depuis 2023 devrait permettre de «renforcer la cohérence des politiques et d’améliorer la coordination du sujet au sein du cadre législatif». «La création de nouveaux indicateurs spécifiques en collaboration avec le Statec permettrait un meilleur suivi et donnerait une visibilité accrue aux efforts réalisés. Elle pourrait en faciliter la lecture et reconnaissance», suggère le rapport.
Autre piste proposée: un meilleur soutien et une valorisation des communes qui sont des acteurs clés du développement durable, mais aussi l’accompagnement des entreprises dont la participation sera essentielle pour atteindre les objectifs fixés pour 2030.