Les États-Unis sont libres de faire ce qu’ils veulent, dit le secrétaire général de l’OCDE, Mathias Cormann, mais les travaux se poursuivent avec les entreprises et les États signataires de ces accords. (Photo: Shutterstock)

Les États-Unis sont libres de faire ce qu’ils veulent, dit le secrétaire général de l’OCDE, Mathias Cormann, mais les travaux se poursuivent avec les entreprises et les États signataires de ces accords. (Photo: Shutterstock)

Dans un de ses premiers «executive orders», le président américain, Donald Trump, demande celui qui deviendra son secrétaire d’État au Trésor de dénoncer à l’OCDE l’accord mondial sur la taxation des multinationales. Et ouvre la voie à un doublement de la taxation. L’institution répond qu’elle continuera à travailler avec les Américains.

«Je me réjouis de la reconnaissance de la conformité de notre législation nationale en matière d’imposition minimale effective des grands groupes d’entreprises au niveau du Cadre inclusif OCDE/G20. Le Luxembourg reste d’ailleurs pleinement engagé à se conformer aux standards fiscaux agréés au niveau international et européen. Et nous continuerons à travailler en étroite collaboration avec le Cadre inclusif OCDE/G20 pour assurer la conformité continue de la législation luxembourgeoise relative au modèle de règles développé par le Cadre inclusif OCDE/G20.» Moins d’une semaine après que le ministre des Finances, (CSV), a exprimé sa satisfaction de voir le Luxembourg classé par l’OCDE parmi les pays qui sont totalement en règle avec Beps, le texte a pris un coup de canif au premier jour du mandat de Donald Trump.

Dans un de ses premiers «executive orders», le 47e président des États-Unis demande à celui qui deviendra son secrétaire d’État au Trésor, à priori Scott Bessent, ex-directeur général et directeur des investissements de Key Square Capital Management, un fonds spéculatif macroéconomique mondial axé sur l’investissement macroéconomique, de dénoncer la politique menée par son prédécesseur, Joe Biden.

«L’accord fiscal mondial de l’OCDE, soutenu par l’administration précédente, permet non seulement une juridiction extraterritoriale sur les revenus américains, mais limite également la capacité de notre pays à adopter des politiques fiscales qui servent les intérêts des entreprises et des travailleurs américains. En raison de l’accord fiscal mondial et d’autres pratiques fiscales étrangères discriminatoires, les entreprises américaines peuvent être confrontées à des régimes fiscaux internationaux de rétorsion si les États-Unis ne se conforment pas aux objectifs de politique fiscale étrangère», peut-on lire dans la note d’accompagnement.

M. Bessent, en consultation avec le représentant commercial des États-Unis, a 60 jours pour «enquêter pour savoir si des pays étrangers ne respectent pas une convention fiscale avec les États-Unis ou ont mis en place, ou sont susceptibles de mettre en place, des règles fiscales extraterritoriales ou affectant de manière disproportionnée les entreprises américaines, et doit élaborer et présenter au président, par l’intermédiaire de l’assistant du président pour la politique économique, une liste d’options de mesures de protection ou d’autres actions que les États-Unis devraient adopter ou prendre en réponse à ce non-respect ou à ces règles fiscales.»

Interrogé mardi après-midi par Paperjam, le secrétaire général de l’Organisation de coopération et de développement économiques, Mathias Cormann, répond que «des préoccupations nous ont été exprimées par des représentants des États-Unis concernant divers aspects de notre accord fiscal international. Les gouvernements démocratiquement élus de nos pays membres représentent les intérêts de leurs nations comme ils le jugent approprié. Les multinationales opérant à l’échelle internationale continueront d’interagir avec les systèmes fiscaux de plusieurs juridictions souveraines. Nous continuerons à travailler avec les États-Unis et tous les pays impliqués pour soutenir une coopération internationale qui favorise la certitude, évite la double imposition et protège les bases fiscales.»

Selon le FT,  le président américain s’appuierait sur une disposition de 90 ans pour aller jusqu’à doubler les taux d’imposition des ressortissants et des entreprises étrangères aux États-Unis. « [L’invocation de l’article 891] est l’option la plus extrême et il est intéressant de constater qu’ils menacent de l’utiliser dès le départ », a déclaré Alex Parker, directeur des affaires législatives fiscales chez Eide Bailly. «Compte tenu de la manière dont la législation est formulée, il semble que ce soit du double ou rien.»

En octobre 2021, plus de 135 pays ont trouvé un accord sur l’imposition minimale effective des grands groupes d’entreprises. Les règles du premier pilier réorientent certains impôts vers les pays d’activité réelle et les règles du pilier deux fixent un taux d’imposition minimum de 15% pour les multinationales dont le chiffre d’affaires est d’au moins 750 millions d’euros.

Dans ce deuxième volet, disait encore le ministre des Finances, «la confirmation que le Luxembourg puisse par ailleurs bénéficier du régime de protection pour l’impôt national complémentaire constitue également une simplification significative pour les groupes implantés au Luxembourg. Celui-ci permet en effet aux groupes de n’effectuer les calculs requis pour l’établissement de l’impôt complémentaire qu’au niveau du Luxembourg, sans que ces calculs ne doivent de nouveau être effectués dans la juridiction de l’entité mère.» Ce qui constitue un avantage non négligeable pour les groupes internationaux qui se retrouvent dispensés de devoir refaire les mêmes calculs dans plusieurs endroits sur l’impôt national.