Romain Hoffmann, le président du Groupement pétrolier luxembourgeois, considère qu’il faut «donner le temps nécessaire au secteur de se réorienter en fonction de la demande de carburants». (Photo: Nader Ghavami/archives)

Romain Hoffmann, le président du Groupement pétrolier luxembourgeois, considère qu’il faut «donner le temps nécessaire au secteur de se réorienter en fonction de la demande de carburants». (Photo: Nader Ghavami/archives)

Le Groupement pétrolier luxembourgeois s’inquiète de la politique gouvernementale en matière de hausse des prix de carburants. Il considère que les mesures mises en place sont inefficaces pour l’environnement et dangereuses pour le secteur pétrolier. 

«L’augmentation des accises n’est pas une mesure de politique climatique vu que l’unique conséquence de cette mesure est une délocalisation des ventes vers d’autres pays», assure le Groupement pétrolier luxembourgeois (GPL) par la voix de son président, Romain Hoffmann. «C’est un choix politique parmi d’autres qui, en plus de n’avoir aucun effet sur le climat, va rendre les prix des carburants plus chers pour les résidents et les frontaliers.»

Le GPL s’inquiète des effets de l’augmentation des accises qui a eu lieu le 1er mai 2019 et de l’annonce faite par le gouvernement en décembre dernier d’une nouvelle augmentation en 2020. Des hausses qui réduisent considérablement les écarts de prix avec les pays voisins, selon le GPL, d’autant plus que la France et la Belgique appliquent un système de remboursement des accises sur le diesel destiné au transport de marchandises et de voyageurs, ce qui n’existe pas au Luxembourg.

«Depuis l’augmentation des accises du 1er mai 2019, les accises sur le diesel au Luxembourg sont plus élevées que les accises sur le diesel après remboursement en Belgique», assure le GPL. Qui ajoute: «Cette décision du gouvernement a clairement engendré une inversion de tendances très importante dans la trajectoire des volumes de ventes.» Entre 2018 et 2019, si les ventes ont augmenté de 11% sur la période entre janvier et avril, ils ont diminué de 2% sur la période de mai à novembre, constate le GPL.

Une diminution nécessaire des écarts de prix 

Dans une réponse parlementaire du 13 janvier dernier, le ministre de l’Énergie, , et le ministre des Finances, , apportaient des réponses à ces préoccupations, assurant que pour atteindre les objectifs environnementaux fixés, une diminution des écarts de prix avec les pays membres de l’UE était nécessaire. Ils assuraient que, malgré les augmentations, «les prix à la pompe resteraient très bas par rapport à la moyenne de l’UE».

Le gouvernement avançait en outre que, concernant l’augmentation prévue en 2020, il prendrait en compte le développement des prix sur les marchés internationaux et les prix dans les États voisins.

Mais le GPL reproche qu’à l’augmentation des prix des accises s’ajoutent les objectifs 2020 prévus par la directive européenne relative aux énergies renouvelables et celle relative à la qualité des carburants. «La hausse significative de l’obligation en matière de biocarburants pour 2020 a eu un effet considérable sur les prix au Luxembourg.» Et, bien sûr, l’instauration d’une taxe carbone inquiète le GPL.

Une «volte-face» de la politique gouvernementale

Le gouvernement rappelait dans sa réponse parlementaire que les États membres de l’UE sont tous tenus de respecter les mêmes obligations et qu’ainsi les écarts de prix avec les pays voisins ne seraient pas affectés.

Insuffisant, selon le GPL, qui déplore que les directives aient «été implémentées de façon tout à fait différente dans tous les pays» et que la transposition luxembourgeoise, «très idéaliste», ait eu comme effet «une augmentation plus que proportionnelle des prix par rapport aux pays avoisinants». Et que la taxe carbone ne soit pas ou plus un sujet ni en Belgique, ni en France.

«Toutes ces augmentations de prix constituent une volte-face à très courte échéance sur un laps de temps très réduit de la politique gouvernementale», estime le GPL, qui prévoit une diminution «très significative» des volumes de ventes, ce qui s’accompagnera d’une diminution de l’emploi dans le secteur (2.600 salariés actuellement) et une «mise en péril» des investisseurs luxembourgeois, selon lui.

«Donner le temps»

Quelles solutions reste-t-il pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre? Le GPL assure ne pas remettre en cause les objectifs climatiques européens 2020 et 2030. Mais il demande toutefois «d’adapter la taxation des produits pétroliers de façon prudente» afin «de donner le temps nécessaire au secteur de se réorienter en fonction de la demande de carburants», et «d’augmenter le taux d’énergies renouvelables dans les carburants de façon linéaire». Rien de moins que ralentir la transition écologique.

Le GPL tient à rappeler que «le secteur pétrolier luxembourgeois contribue à la réduction des émissions» et que «les émissions de gaz à effet de serre ont diminué de 6% sur toute la chaîne de production»… en 15 ans. Le Luxembourg s’est quant à lui engagé, pour respecter les accords de Paris, à réduire ses émissions de CO2 de 50 à 55% d’ici 2030 (par rapport à 2005) et à atteindre la neutralité carbone en 2050.