Pour 2023, les recettes totales de l’Administration centrale se montent à 24,5 milliards d’euros, contre 27,3 milliards de dépenses, soit un déficit de 2,8 milliards d’euros, en augmentation (il était de 1,2 milliard d’euros en 2022). Le budget 2023 se veut le reflet d’une politique d’investissement ambitieuse, tenant compte d’un contexte et d’une situation des finances publiques qui font que la ministre des Finances (DP) le qualifie de «réaliste, solidaire et responsable». Celle-ci a rappelé qu’en 2022, plus de 2,5 milliards d’euros ont été investis dans le cadre des deux tripartites et du plan énergie, soit 3,3% du PIB. «Ce sont 2,5 milliards qui n’étaient prévus dans aucun budget et qui viendront s’ajouter aux 3 milliards que le gouvernement a investis pendant la pandémie, également non prévus.»
Quant à l’Administration publique (qui englobe l’Administration centrale, les administrations locales et la Sécurité sociale dans son ensemble), le solde pour 2023 affiche également un déficit de 1,8 milliard d’euros, en augmentation également. Yuriko Backes explique ces chiffres en indiquant qu’«en temps de crise, il est justifié de dépenser plus qu’on ne reçoit». L’évolution du PIB réel est prévue à 2% en 2023 (contre 2,7% prévus en 2022) compte tenu des efforts d’investissement consentis par l’État et à venir.
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Le triple A plus important que le seuil de 30%
Le Luxembourg continuera à respecter son seuil symbolique d’endettement en dessous de 30% du PIB, avec une dette qui s’établira à 26,3% du PIB en 2023, dont 3,6% de financement de mesures Covid, et 3% de financement des mesures crise énergie. Parallèlement, le Statec prévoit pour 2023 une croissance à seulement 2% (contre 3,5% en 2022), et un taux d’inflation contenu autour de 2,8% grâce aux mesures déjà annoncées.
Dans son discours, Yuriko Backes a indiqué ne pas vouloir «jeter du sable dans les yeux des gens», avant de compléter, après la séance: «Nous sommes dans une situation de crise. Cela nous coûte beaucoup d’argent, déjà pendant la pandémie, puis depuis la crise énergétique, pourtant il faut continuer à aider les entreprises et les ménages. Ces coûts sont nécessaires. Cependant, on ne peut pas faire de folies.»
Certes, la dette publique se rapproche de plus en plus du seuil des 30%, mais cela ne semble pas inquiéter la ministre outre mesure. «Je crois que c’est réaliste de pouvoir rester sous ce seuil, nous allons tout faire pour, car c’est inscrit dans l’accord de coalition. Néanmoins, ces 30% ne sont qu’une indication. On a presque perdu le triple A lorsqu’on était à -25% de dette du PIB… La trajectoire est plus importante que le pourcentage.»
Avec moi, il n’y a pas de hara-kiri politique et financier!
Dans une partie de son discours, qui a fait réagir l’assemblée, la ministre a fait allusion aux allégements fiscaux massifs pris par le Royaume-Uni, qui ont failli coûter cher à la place financière, puisque les agences de notation ont abaissé la perspective du pays de stable à négative. «Du jour au lendemain, les marchés étaient au bord de l’effondrement. La banque centrale anglaise a dû intervenir. Je ne prendrai pas ce risque! Avec moi, il n’y a pas de hara-kiri politique et financier!» Le budget prévoit tout de même une marge de manœuvre en fonction de l’évolution de la situation économique en 2023 et indique que, «si les perspectives sont structurellement meilleures que prévu, des allégements supplémentaires suivront».
Augmentation du crédit d’impôt monoparental
Il n’y aura pas d’ajustement du barème d’imposition à l’inflation ni de réforme de classe d’impôt en une classe unique. Explication de la ministre: «Cela coûterait à l’État chaque année 2 milliards de déficit en plus (…) Depuis 2020, le gouvernement a besoin d’argent pour aider les gens à traverser les crises. Ce n’est pas le moment de renoncer aux recettes fiscales.»
Néanmoins, le gouvernement a prévu un allégement majeur de la charge fiscale des familles monoparentales, en augmentant à partir du 1er janvier 2023 le montant maximal du «crédit d’impôt monoparental» (CIM) de 1.500 euros à 2.505 euros. Outre cette augmentation de 67%, le plafond de revenus annuels jusqu’auquel un contribuable peut bénéficier du montant maximal du CIM sera relevé de 35.000 euros à 60.000 euros. Le gouvernement prévoit aussi d’augmenter les fourchettes de revenu au titre desquelles les contribuables pourront bénéficier du «crédit d’impôt sur le salaire social minimum» (CISSM). Le budget 2023 comprend une forte composante sociale, avec 47% des dépenses totales de l’Administration centrale dédiées aux prestations sociales, subsides, subventions et transferts à la Sécurité sociale. Ces dépenses seront financées principalement par les impôts directs et indirects, dont les recettes sont estimées à 86% des recettes totales de l’Administration centrale.
En temps de crise, il est justifié de dépenser plus qu’on ne reçoit.
Appel d’air sur le logement et la santé
Le ministère du Logement voit son budget renforcé à 282 millions d’euros, tandis que le budget du Fonds spécial de soutien au développement du logement sera porté à 192 millions d’euros. Pour limiter la spéculation et pour contenir la pression sur les prix à travers une demande trop importante, le dispositif fiscal de l’amortissement accéléré est réformé. À partir de l’année fiscale 2023, tout contribuable ne pourra plus que bénéficier de ce dispositif fiscal avantageux pour deux immeubles ou parties d’immeubles affectés au logement locatif. Quant au budget des seuls hôpitaux, pour les deux années à venir, il est fixé à 2,9 milliards, en progression de 369 millions d’euros, soit de 14,6%.
Poursuite des investissements sur le développement durable
Les investissements publics ont atteint un nouveau niveau record de 3,8 milliards d’euros en 2023, soit 4,6% du PIB prévu dans les domaines de la mobilité, de l’éducation, de la santé et des infrastructures. Les investissements environnementaux et climatiques représentent à eux seuls 1,2 milliard d’euros en 2023, et ceux pour la digitalisation, 1,5 milliard (jusqu’en 2026). La vente, la location, ainsi que la réparation de vélos et la réparation d’appareils ménagers, seront dorénavant soumises au taux de TVA réduit de 8% (réduit à 7% pour l’année 2023, suite à l’accord tripartite). Enfin, le taux de TVA super-réduit de 3% s’appliquera à partir de 2023 à la livraison de panneaux solaires.