En dix ans, Banque Raiffeisen est devenue une des dernières banques de la place qui n’ait pas de problème particulier à rencontrer les journalistes au moins une fois par an, en amont de son assemblée générale, pour partager non seulement ses résultats annuels, mais aussi le contexte qui va avec, sans filtre et loin des discours populistes qui foisonnent. Probablement le résultat d’une attitude constante, rappelée dans chaque communiqué de presse: gestion rigoureuse, développement constant des activités, approche équilibrée.
À 99 ans, la vieille dame mutualiste ne frime pas, elle avance avec les certitudes nées de ses choix. 2024 s’est terminée sur un bénéfice net de 28,1 millions d’euros, en hausse de 10% sur un an; sur une hausse du produit bancaire de 3,6% à 245 millions d’euros; sur une hausse de ses coûts d’exploitation de 3,6% liée à sa volonté de continuer à recruter et à former ses 738 employés pour répondre aux enjeux de ses 130.000 clients, dont 54.000 membres; sur un total des dépôts qui atteint 10,34 milliards d’euros, en hausse de près de 750 millions d’euros ou bien sur un renforcement de ses fonds propres de 8,1% (+62,5 millions d’euros).
«Notre banque continue de faire preuve de solidité et d’adaptabilité», commente le président du conseil d’administration de Banque Raiffeisen, , qui dira plus tard que sa banque «n’a pas vocation à devenir un club d’épargne», mais «à saisir chaque opportunité qui se présentera». «Contrairement à nos collègues cotés, nous ne courrons pas derrière les résultats trimestriels», glisse-t-il dans l’unique pique à la concurrence.
La hausse de 750 millions d’euros des dépôts, 420 millions de particuliers et 328 millions des professionnels, n’est pas un bon signe pour l’économie, cela signifie que l’argent n’y circule pas aussi bien. «Avec 40 années d’expérience», dit encore M. Hoffmann, «je ne suis pas étonné que les dépôts augmentent. Ça a toujours été le cas au moment où l’économie tournait moins bien. Les gens se préparent pour des périodes un peu plus difficiles, commencent à épargner et dépensent moins», commente-t-il. Et le président du CA ajoute aussitôt: «L’objectif de la banque n’est pas d’accumuler des dépôts, mais de les utiliser pour octroyer des crédits et soutenir le développement de l’économie… bien que la demande de crédit reste inférieure au niveau des années précédentes.»
Un troisième business hub à Esch et un agri-hub à venir
«Le taux de référence était quand même relativement élevé l’an dernier, il y a beaucoup de dépôts des ménages qui se sont orientés vers les dépôts à terme. Maintenant que les taux sont en train de descendre à nouveau, on espère qu’il y aura davantage de placements sur les marchés», complète le directeur général, .
Malgré les difficultés du marché immobilier, les encours de crédit à la clientèle particulière — 50% de Luxembourgeois et 50% de résidents selon , en charge de la politique commerciale — ont tout de même augmenté de 2,2% ou 166 millions d’euros à 7,8 milliards d’euros, surtout à partir du second semestre, alors que ceux des collectivités locales et paraétatiques ont augmenté de 27% l’an dernier.
La banque mutualiste, qui décide actuellement d’un positionnement face à la volonté européenne d’aller chercher les 10.000 milliards d’euros que les Européens détiennent en épargne liquide pour financer un effort de défense sans précédent à l’ère moderne, poursuit sa politique d’expansion physique, à contre-courant des autres banques de retail avec 28 agences et une agence en ligne et un troisième business hub à Esch-sur-Alzette, après ceux de Leudelange et d’Ettelbruck.
D’ici la fin de l’année, a aussi dit Mme De Vuyst, sera ouvert un agri-hub pour offrir aux 11 à 12% du secteur agricole un point d’entrée qualifié dans le conseil à ces activités en grand besoin de financement. «On se rend vraiment compte que certains agriculteurs ont besoin d’un peu plus de soutien justement au niveau de cette transition, qu’elle soit énergétique ou autre ou d’expansion. Et ils ont besoin d’une façon de travailler de manière un peu plus rigoureuse. Et donc c’est pour ça qu’on a décidé de mettre un peu plus les forces ensemble, d’avoir une équipe vraiment dédiée. On voit aussi qu’à la période des poignées de mains pour sceller des accords, il faut aujourd’hui passer par des dossiers plus “administratifs”.»
Alors que l’espoir d’un retour «à la normale» du secteur immobilier se dessine avec lenteur, le président du conseil d’administration redoute davantage l’évolution «du taux de chômage. Quand les gens ont un travail et restent dans leur activité, et qu’ils ont besoin de solutions de financement, on finit toujours par trouver une solution.»