Parmi ces «bombes carbone», on en retrouve deux situées en Allemagne, dont la mine de lignite Hambach, dans la région minière de Rhénanie. (Photo: Shutterstock)

Parmi ces «bombes carbone», on en retrouve deux situées en Allemagne, dont la mine de lignite Hambach, dans la région minière de Rhénanie. (Photo: Shutterstock)

425 «bombes carbone» – des mégaprojets d’extraction de charbon, pétrole et gaz – seraient susceptibles à elles seules de provoquer le dépassement des limites du budget carbone mondial, selon une étude publiée dans la revue Energy policy.

Avec les potentielles émissions des 425 plus gros projets d’extraction de combustibles fossiles (charbon, pétrole, gaz) qui existent dans le monde, le budget carbone disponible afin de ne pas dépasser les 1,5°C de réchauffement climatique sera dépassé par un facteur de deux.

C’est la conclusion d’une étude . Celle-ci identifie 425 «bombes carbone» mettant à mal à elles seules les ambitions climatiques – ces bombes étant les 425 mégaprojets d’extraction de combustibles fossiles, existants ou planifiés, dépassant un gigatonne de CO2 émis si leurs réserves sont intégralement consommées.

Sur ces 425 «bombes carbone», 195 concernent des champs d’extraction de pétrole ou de gaz, dont 76 n’ont pas encore débuté leur production. 230 mines de charbon de plus d’une gigatonne de CO2 ont par ailleurs été identifiées, dont 93 n’ont pas encore commencé leur production. On retrouve parmi ces projets celui de Montney Play au Canada, de North Field au Qatar ou de Bovanenkovo en Russie, mais aussi la gigantesque mine de charbon Hongshaquan en Chine ou, plus proches, celles de Hambach ou de Garzweiler en Allemagne.

Budget carbone dépassé

Si les réserves de ces champs d’extraction actuellement en production étaient extraites et consommées dans leur intégralité, cela correspondrait à plus de 763 gigatonnes de CO2 émises dans l’atmosphère. Bien au-dessus des objectifs de l’accord de Paris: pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, le budget carbone limite est estimé entre 420 et 580 gigatonnes de CO2, selon le Giec.

En outre, si on ajoute à ce montant les projets d’extraction qui n’ont pas encore vu le jour, mais qui sont planifiés, cela porterait l’ensemble à 1.182,3 gigatonnes de CO2 potentiellement émises – soit le double du seuil permis.

10 pays en ligne de mire

Parmi les entreprises à l’origine de ces projets d’extraction, on trouve les habituels Gazprom, Saudi Aramco, ExxonMobil et Petrobras, sans oublier TotalEnergies, Chevron, Shell et BP. Et, concernant les régions concernées, les auteurs de l’étude remarquent que seuls 10 pays cumulent plus de 10 de ces «bombes carbone» et deux tiers des émissions carbone potentielles: la Chine, la Russie et les États-Unis en tête, mais aussi des pays du Moyen-Orient.

10 pays cumulent plus de 10 de ces «bombes carbone» et deux tiers des émissions carbone potentielles – avec la Chine, la Russie et les États-Unis en tête. (Illustration: Energy policy)

10 pays cumulent plus de 10 de ces «bombes carbone» et deux tiers des émissions carbone potentielles – avec la Chine, la Russie et les États-Unis en tête. (Illustration: Energy policy)

De quoi rester relativement optimiste, selon les auteurs du rapport: «Cela permet de mieux cibler les efforts multilatéraux, puisque seulement un nombre limité de gouvernements devront participer aux discussions», explique ainsi le rapport.

L’objectif affiché du rapport est en effet de rendre mieux identifiables les priorités – en l’occurrence, ces 425 «bombes carbone» – sur lesquelles agir au niveau de la production pour parvenir à limiter les émissions de gaz à effet de serre. «Cette liste peut soutenir les militants et les décideurs politiques en vue de fixer les priorités et de préparer les prochaines étapes afin de désamorcer ces bombes carbone», déclarent ainsi les auteurs de l’étude.

Pas de nouveau projet

Il y a en tout cas fort à faire sur ce sujet: la combustion des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz) est responsable de 80% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Selon la récente feuille de route de l’agence internationale de l’énergie (AIE) pour atteindre la neutralité carbone en 2050, aucun nouveau projet de champs pétrolifères ou gaziers ne doit désormais être mis en œuvre si nous voulons conserver une chance de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, comme le prévoit l’accord de Paris.

C’est pourtant loin d’être le cas. Le dernier «production gap report» des Nations unies, publié en 2021, constate que les politiques publiques actuelles dirigent le monde vers une production de combustibles fossiles plus de deux fois supérieure à celle compatible avec un tel objectif.

Cet article a été rédigé pour la newsletter Paperjam Green, le rendez-vous mensuel pour suivre l’actualité en matière d’environnement, de climat, de mobilité, de RSE et de green finance.