Raoul Vinandy, directeur opérationnel de Servior, et Corinne Cahen, ministre de la Famille et de l’Intégration, se sont expliqués sur le cluster de Niederkorn. (Photo: SIP / Jean-Christophe Verhaegen)

Raoul Vinandy, directeur opérationnel de Servior, et Corinne Cahen, ministre de la Famille et de l’Intégration, se sont expliqués sur le cluster de Niederkorn. (Photo: SIP / Jean-Christophe Verhaegen)

Les partis de l’opposition pointent la gestion de la crise sanitaire dans les maisons de soins de la part du gouvernement. Et particulièrement le cas du Cipa «Um Lauterbann» de Niederkorn, où un cluster a fait 22 victimes.

Mardi 23 mars, au matin, on dénombrait 719 décès liés au Covid-19 au Luxembourg depuis le début de la pandémie. Dont 324 issus des maisons de retraite et de soins du pays. Un chiffre forcément effrayant, qui pousse aujourd’hui certains politiques, de l’opposition, à s’interroger sur la gestion de la crise par la majorité.

Déi Lénk y est ainsi allé de son communiqué ce mardi, y expliquant notamment que «de toutes parts, des voix s’élèvent désormais qui affirment que quelque part dans le passé et dans l’historique de la gestion de cette pandémie par le gouvernement, des erreurs politiques fatales ont été commises». Tandis qu’à la Chambre des députés, sur base d’une motion de (CSV), on a interrogé notamment les ministres de la Famille (DP) et de la Santé (LSAP), ainsi que le directeur de la Santé, sur le même sujet.

Un dossier est particulièrement représentatif de cette situation, celui du Centre intégré pour personnes âgées (Cipa) «Um Lauterbann» de Niederkorn. Ce dernier a été victime récemment d’un cluster ayant fait 22 victimes. «10 personnes sont encore positives aujourd’hui. Deux sont sous oxygène, une troisième hospitalisée. Les sept autres sont asymptomatiques…», a expliqué ce mardi Corinne Cahen lors d’une conférence de presse consacrée spécialement à ce cluster.

«Une maison de retraite n’est pas une prison»

Les questions ont forcément été nombreuses sur ce drame qui a marqué les esprits, mais elles peuvent se résumer en une seule: comment le virus a-t-il pu arriver dans cet établissement d’une capacité de 155 lits? Ou formulé autrement: comment 80 résidents et 40 membres du personnel ont-ils pu être ainsi contaminés à Niederkorn? Une question dont personne ne possède aujourd’hui la réponse.

Mais il y a forcément des pistes. Le côté «vieillot» du bâtiment (une nouvelle institution arrive en 2023 à Bascharage) qui n’a pas rendu possible le «cohortage» (c’est-à-dire le regroupement des patients infectés pour une prise en charge par une équipe spécifique) lorsqu’on dénombrait quatre cas positifs. Le fait que les victimes étaient également âgées (88 ans de moyenne d’âge) et souffraient de pathologies lourdes.

«Par où le virus a-t-il pu rentrer? Une maison de retraite n’est pas une prison. Des personnes viennent y travailler. Des résidents peuvent en sortir. On ne peut isoler tout le monde tout le temps. Il est donc possible que le virus puisse s’y propager», expliquait , le directeur de la Santé, également présent lors de cette conférence de presse.

Ce dernier soulignait que le taux de mortalité à Niederkorn «n’est pas forcément supérieur à ce que l’on voit à l’étranger», tout en ajoutant qu’il «ne veut pas banaliser la situation» et que «chaque décès est déjà de trop».

La vaccination n’est pas à la base du cluster

Le premier cas d’infection ayant été détecté à Niederkorn pratiquement au même moment que débutait la vaccination dans ce même établissement, il n’avait pas fallu longtemps pour que certains lancent sur les réseaux sociaux que le vaccin était responsable du cluster. Une idée à laquelle le directeur de la Santé a dû tordre le cou ce mardi. «La vaccination ne peut pas déclencher d’infection», a-t-il martelé. «C’est important de le clarifier. Les personnes qui disent de telles choses sur les réseaux sociaux mélangent tout…» Ou n’y connaissent rien.

Dans le cas de «Um Lauterbann», le délai entre la vaccination et l’infection de la plupart des patients a été trop court pour que le vaccin puisse agir. L’établissement était l’un des derniers Cipa de Servior à recevoir la première dose. «Pour des raisons organisationnelles et selon un ordre défini avec la Copas», a justifié Jean-Claude Schmit. «Et si l’ordre avait été différent, rien ne dit qu’un cluster n’aurait pas éclaté ailleurs.»

Huit décès aussi à Kayl

À l’heure actuelle, on en dénombre d’ailleurs dans d’autres établissements. La ministre Cahen a cité ceux de Bofferdange, Rodange, Rédange, Schifflange et Kayl. Ce dernier est également particulièrement touché. Huit de ses 39 résidents sont ainsi décédés, 25 ont été testés positifs, tout comme 13 membres de son personnel. On note également qu’un total de 64 personnes issues des maisons de retraite et de soins du pays sont toujours positives.

La bonne nouvelle, c’est qu’en fin de semaine, les pensionnaires des 52 établissements du Luxembourg auront reçu les deux doses du vaccin. Reste à voir maintenant si l’immunité accordée par celui-ci est supérieure à l’immunité naturelle. «Je l’espère…», a lancé Jean-Claude Schmit, tout en révélant que des résidents de Niederkorn aujourd’hui décédés avaient déjà été infectés une première fois par le virus. «Mais il semble que l’immunité naturelle est moins bonne chez les plus de 65 ans…», a-t-il conclu.