Du 12 au 15 mars 2024, Cannes a accueilli le Mipim, le marché international des professionnels de l’immobilier. Un rendez-vous incontournable pour connecter et inspirer la communauté immobilière internationale, les investisseurs, les utilisateurs, les acteurs de l’innovation et les autorités publiques. «La présence au Mipim est fondamentale pour l’OAI, car cet événement rassemble toute la chaîne de valeur du secteur immobilier, des banquiers aux constructeurs, incluant les développeurs, les services juridiques et assurantiels, ainsi que les concepteurs indépendants comme les architectes, les ingénieurs-conseils et les urbanistes», constate la présidente de l’Ordre des architectes et des ingénieurs-conseils, .
Deux moments forts
Accompagnée du vice-président de l’OAI, Patrick Nosbusch, et du directeur, , Michelle Friederici souhaitait profiter de ce salon pour mettre en lumière les plus beaux projets portés par ses membres, notamment au travers du guide Architectour.lu, la référence pour découvrir l’architecture, l’ingénierie et l’urbanisme contemporains au Luxembourg. «Cet outil est bien implanté pour soutenir les acteurs du tourisme, mais également le ministère des Affaires étrangères, le ministère de la Culture – Kultur | lx – ou encore la Chambre de commerce dans la promotion de la destination Luxembourg. Des guides touristiques internationaux s’appuient aussi sur la richesse de cette initiative», souligne la présidente.
Dans un deuxième temps, l’OAI a présenté la mise à jour de son site (Luxembourg Architectes Ingénieurs-Conseils Exchange/Export) sur le thème «Design first, build smart, sustainable, inclusive and regional». «L’accent est mis en premier lieu sur les projets traitant de questions contextuelles réalisés dans le monde entier, par des architectes et des ingénieurs-conseils installés au Luxembourg», précise Michelle Friederici. La publication met notamment en avant le savoir-faire des membres de l’OAI en matière de bâtiments écologiques certifiés au Luxembourg.
De manière plus générale, le Mipim est l’occasion de découvrir ce qui se fait à l’étranger, d’assister à la présentation de projets internationaux, de s’inspirer des dernières tendances et de se rencontrer. «Notre stand reçoit chaque année de nombreux visiteurs et nos membres sont heureux de pouvoir répondre à leurs questions. Nous y rencontrons aussi nos confrères des Ordres belges, allemands et français. Cet événement permet également d’interagir avec les autres acteurs luxembourgeois dans un contexte innovant, favorisant des discussions enrichissantes sur des thématiques importantes.»
Pour un cadre de vie durable
Parmi les sujets à l’agenda des architectes et des ingénieurs-conseils, la construction durable occupe une place de choix. Dans la période actuelle où le logement connaît une crise importante, il devient crucial d’adapter la construction aux nouveaux enjeux économiques et écologiques. Les initiatives se multiplient à travers toute l’Europe, de nombreux acteurs du secteur sont en train de passer à l’action pour décarboner activement la ville et construire des bâtiments neufs à faible impact carbone.
Le 22 août dernier, l’OAI a d’ailleurs présenté sa charte pour un cadre de vie durable et un vivre-ensemble de qualité. «Nos professions doivent relever le défi du changement climatique, de la croissance démographique et de l’urbanisation en proposant des solutions créatives, ingénieuses, techniques et innovantes pour répondre aux enjeux d’aujourd’hui et de demain», explique Michelle Friederici. «Désormais, les architectes, ingénieurs-conseils, urbanistes-aménageurs, architectes d’intérieur, architectes-paysagistes et géomètres réfléchissent à l’ensemble des composantes de l’acte de construire comme fait culturel. Dans le respect de notre ‘Baukultur’, ces activités intellectuelles sont la condition sine qua non à la construction d’espaces, de bâtiments, de logements et d’infrastructures et à un aménagement du territoire et du développement urbain et rural équilibrés, résilients, justes et de qualité.»
Nos professions doivent relever le défi du changement climatique, de la croissance démographique et de l’urbanisation.
Les membres de l’OAI s’engagent désormais à traiter leurs projets dans le respect des objectifs du développement durable. Cela implique, par exemple, d’évaluer l’ensemble des projets sous l’angle de la réduction des effets nocifs contribuant au changement climatique et du respect de la biodiversité. «Nous devons considérer les enjeux environnementaux à tous les stades de la conception d’un objet à construire, à entretenir, à rénover, à transformer ou à déconstruire. Ces réflexions portent aussi sur les interventions en amont, telles que la viabilisation d’un terrain, mais aussi les ultimes travaux, tels que la restitution du terrain en l’état ou sa revalorisation afin de considérer l’ensemble du cycle de vie de l’objet», ajoute la présidente.
La charte comprend un total de 13 actions afin de mettre en œuvre et partager les meilleures pratiques en matière de construction durable et d’économie circulaire. Dans ce cadre, les sujets de la déconstruction et de la décarbonation reçoivent une attention toute particulière. Le Conseil national pour la construction durable (CNCD), dont l’OAI est membre fondateur, a notamment organisé, en octobre dernier, une conférence autour de la décarbonation du secteur luxembourgeois de la construction. Alors que le cadre stratégique et réglementaire européen et luxembourgeois s’intensifie, il est désormais important pour tous les acteurs de comprendre les outils de mesure des émissions de CO2, de partager des solutions et bonnes pratiques.
«Un sujet passionnant»
«Concevoir des bâtiments qui peuvent ensuite être facilement déconstruits est un sujet passionnant pour nos métiers», témoigne encore Michelle Friederici. «On peut aujourd’hui imaginer, par exemple, que des éléments démontés puissent être utilisés dans un autre bâtiment. Au Luxembourg, la question du stockage de ces matériaux est un sujet important. Certaines personnes travaillent déjà sur la création d’une base de données, qui ferait le lien entre les éléments en cours de déconstruction pour leur permettre d’être réutilisés immédiatement sur un nouveau chantier…»
Toutes ces recherches et évolutions n’ont d’autre but que de faire face au changement climatique. «Nous agissons sur ce thème depuis longtemps, en proposant des formations en partenariat avec les institutions au Luxembourg et à l’étranger. D’un autre côté, nous menons depuis 2020 un projet avec le ministère de l’Énergie et de l’Aménagement du territoire pour la construction circulaire. Dans la première phase, nous avons répertorié tous les facteurs qui empêchent un développement rapide de la construction circulaire, ainsi que tous les projets pilotes et initiatives dans ce domaine. Nous sommes maintenant dans la deuxième phase du projet, qui consiste à nous interroger sur la capacité du Luxembourg – et de ses partenaires dans la Grande Région – à fournir des matières premières renouvelables. Il n’y a que de cette manière que nous pourrons améliorer notre qualité de vie et relever les défis concernant la construction durable et l’économie circulaire.»
La révolution IA
Au-delà de ces enjeux environnementaux, l’OAI poursuit d’autres travaux relatifs à l’évolution de ces métiers, à commencer par l’émergence de l’intelligence artificielle. «Une chose est sûre, le travail dans les bureaux d’études va lui aussi être transformé par l’IA», constate Michelle Friederici. «De la production de textes à celle d’images et de vidéos en passant par l’analyse de données, les outils accessibles au public sont déjà utilisés au quotidien. Notre rôle est de porter notre regard sur l’avenir, pas si lointain, de l’IA dans le domaine de la planification et de la construction. Même si je pense que l’humain aura toujours une place centrale dans nos métiers créatifs. Au quotidien, nos membres travaillent sur des projets innovants qui illustrent notre engagement envers des solutions architecturales et urbanistiques avant-gardistes dans le domaine de la construction durable. Il est important de le rappeler dans un salon comme le Mipim.»
Gebäudetyp E: construire de manière plus expérimentale et plus simple
En Allemagne, les architectes travaillent sur une nouvelle catégorie de bâtiments de type E, comme «expérimental» ou «Einfach», qui veut dire «simple» en français. L’OAI observe de près ces recherches qui permettent à nouveau plus de liberté dans la construction. Ce n’est un secret pour personne, la construction devient de plus en plus compliquée, lente et coûteuse, alors qu’elle devrait pourtant être plus simple, plus rapide, moins chère et également plus variée sur le plan architectural. «Mais si l’on veut s’en tenir à toutes les règles, les innovations architecturales sont difficilement réalisables», constate Michelle Friederici. «Les normes et les réglementations déterminent en grande partie la mise en œuvre technique des bâtiments, mais aussi leurs dimensions et leurs normes d’équipement.» En bref, les maîtres d’ouvrage et leurs concepteurs ne déterminent plus que dans un cadre restreint les priorités et les qualités qu’ils souhaitent donner à leur projet. Et ils ne décident que de manière limitée de la façon dont les objectifs sont atteints sur le plan de la construction.
Repenser les règles de la construction
Pour contrer cette tendance, les architectes allemands ont imaginé le bâtiment de type E. Un projet «E» implique de travailler avec un ensemble réduit de règles, ce qui permet aux maîtres d’ouvrage et aux concepteurs d’adapter les normes, les matériaux et les détails d’exécution les uns aux autres, de manière à créer des bâtiments durables à des coûts abordables. Un marquage visible des nouveaux types de bâtiments «E» indique aux utilisateurs que ces derniers s’écartent éventuellement des normes courantes, mais sans pour autant négliger les objectifs de protection du Code de la construction. Les écarts peuvent être identifiés et expliqués aux utilisateurs en toute transparence. Les maîtres d’ouvrage obtiennent à nouveau la liberté de décider de leurs projets s’ils souhaitent s’engager dans de nouvelles voies en matière de construction. Ils ont la possibilité de construire de manière innovante, en réduisant les normes, et donc à moindre coût. De son côté, l’OAI s’intéresse à toute initiative qui redonne de l’espace pour les innovations en matière de durabilité et d’accessibilité financière.
Cet article a été rédigé pour le supplément Mipim 2024 de l’édition de parue le 28 février. Le contenu du magazine est produit en exclusivité pour le magazine. Il est publié sur le site pour contribuer aux archives complètes de Paperjam.
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